OBSERVATION XI
(Années 1885-1880)
HYSTERIE - SENSIBILITE
AUX ORAGES. SENSIBILITE a L'HYPNOSCOPE
GUÉRISON DE LA MIGRAINE
PARl LA NEURISATION.
Mme X... est agée de
vingt-sept ans. Son père, sa mère, son grand-père
paternel et sa grand-mère maternellesont doués d'un tempérament nerveux.
Elle a été réglée à l'âge de douze ans et il parait
qu'à cet âge elle etait grande et développée comme elle l'a été depuis. Depuis elle a eu
ses époques régulièrement. Dès l'âge de lapuberté elle a
été nerveuse et depuis sujette à des attaques
nerveuses légères, à des spasmes pharyngiens.
Elle pense qu'elle a été noctambule, mais
elle ne saurait l'affirmer.
Elle est très sensible aux
changements de temps, peut prévoir
la tombée de la neige et les orages par un
état d'énervement dans
lequel elle se trouve du reste parfois
dans d'autres circonstances.
Je n'ai trouvé sur elle aucune trace de
trouble sensitif. Pas
d'hémianesthésie.
Dans ses antécédents morbides je
relève qu'elle a eu une péri-lôiiilf suite de couches, dont elle a
parfaitement guéri ; que de plus elle a été atteinte d'une lésion tuberculeuse
au sommet du poumon droit dont il ne reste aujourd'hui que des traces
très effacées. Dans le cours de cette manifestation tuberculeuse ou
pseudo-tuberculeuse, elle a eu plusieurs poussées de pleurésie aiguë
sèche â droite qui n'ont laissé aucune trace.
Le 5janvier 1885 je fus appelé auprès de Mme X... pour une névralgie
sus-orbitaire et sous-occipitale gauche tres intense. Cette névralgie avait débuté brusquement a minuit. Je
dois ajouter que la veille au soir il faisait un froid très vif,
le thermomètre marquait 5' C. au-dessous de zéro, indice, d'ailleurs,
de la tombée de la neige sur les Alpes. La malade a étê
énervée toute la nuit, s'agitant, pleurant, etc.
J'avais soigné Mme X...jusqu'à cette époque pour son affection de poitrine, j'étais mandé celle fois pour
la soulager de sa névralgie, espérant que
je réussirais chez elle aussi promptement et aussi complètement
qu'auprès de Mme L. G... dont il est question dans l'observation X.
Mais avant de procéder aux pratiques de la
neurisation, j'ai voulu savoir si Mme X... était sensible à l'hypnoscope.
APPLICATION
DE L'HYPNOSCOPE D'OCHOROWICZ
Je priai Mme X...d'introduire le doigt indicateur de sa main droite dans l'hypnoscope.
Après moins de
deux minutes elle éprouva une sensation d'en-gourdissement qui du doigt
remontait jusqu'à l'épaule. Puis il lui sembla que le doigt était gonflé et remplissait
tout le vide un l'instrument.
Après six minutes celte sensation
reste stationnaire. Je relire alors l'hypnoscope et je constate que la
sensibilité du doigt a manifestement diminué.
D'après ces
résultats je pensai qu'elle pourrait être neurisée avec de grandes chances de succès.
NERISATION CRANIENNE
Je fis des passes ascendantes appliquées
au niveau du crane, d'abord au front, puis à l'occiput et ensuite
à la région temporale du côté gauche.
Après quinze
minutes la douleur avait cessé partout. Puis, comme elle semblait
revenir au-dessus de l'œil gauche, je fis de nouvelles passes qui la soulagèrent
complètement.
Le 11 mars je fus
mandé de nouveau pour un nouvel accès de migraine à gauche. Je fis de nouveau des
passes ascendantes craniennes, tantôt appliquées, tantôt distantes, et
la douleur disparut après
quelques minutes.
Le 16 janvier 1880, m'étant rendu dans la
matinée auprès de MmeX... pour la
continuation des soins que nécessitait une entorse du pied gauche qu'elle
s'était faite récemment, je la trouvai souffrant depuis la nuit d'une névralgie qui
interresait branches ophthialmique et
maxillaire supérieure du trijumeau à gauche.
La cause occasionnelle et prochaine de
celle névralgie était l'excès de
chaleur qu'elle avait dû supporter dans son salon la veille au
soir, et la cause prédisposante semblait être le voisinage des menstrues
qui avaient cessé deux jours auparavant. Il est bien certain d'ailleurs que
généralement elle souffre de migraine un peu avant ses époques.
Je proposai à
Mme X...les moyens employés
précédemment pour combattre
celle névralgie et elle les accepta très volontiers.
Je lis donc au
crâne, spécialement en regard de la partie gauche et antérieure, des passes digitales ascendantes
tantôt appliquées tantôt distantes, mais
surtout distantes. Celles-ci paraissaientavoir plus d'action
que les appliquées, du moins la malade le prétendait, ajoutant que, à distance, elle
sentait la chaleur de mes doigts. Celle
sensation de chaleur se manifestait sous forme d'un courant d'air chaud suivant la direction de mes doigts. Mais
ce qui étonnait la malade, c'est que
lorsque j'appliquais mes doigts sur le front ou la tempe elle ne les trouvait pas chauds et en tous cas leur chaleur était de beaucoup inférieure à celle dont
elle recevait l'impression lorsque
je faisais des passes distantes. Il devenait donc manifeste qu'un courant
particulier ou une sorte de rayonnement parti de de l'extrémité de
mes doigts impressionnait ses téguments. Parfois je dirigeais un ou plusieurs
de mes doigts immobiles vers un point du
front ou du cuir chevelu et elle y accusait de la chaleur fixe sous
forme de point ou de plaque, alors môme que ni la vue ni l'ouïe, ni le
loucher pouvaient la renseigner sur mes manœuvres.
D'ailleurs, la malade étant couchée dans la position demi assise, je m'étais
dés le début placé à la tète même du lit de telle façon que
j'échappais entièrement à son regard.
Outre les passes
crâniennes ascendantes je fis des passes faciales descendantes a gaucho, tantôt appliquées, tantôt
distantes.
Je fis encore de
grandes passes descendantes à partir des yeux, c'est-à-dire
à partir de la ligne naso-auriculo-cervicale dans le domaine des nerfs descendants.
Une minute
environ après les premières passes crâniennes Mme X...
éprouva un soulagement manifeste mais elle se sentit en même temps un peu énervée. Mais pendant
qu'elle éprouvait du soulagement dans les régions frontale et temporale
gauches les premières influencées par les passes, elle accusait une plus
vive douleur le long de la mâchoire à gauche. C'est alors que je
fis des passes descendantes en regard de celte région, qui égalisèrent
le soulagement dans les régions
douloureuses cranio-faciales. Après dix ou douze minutes de
passes aussi faites dans le domaine des nerfs ascendants et de celles faites
dans le domaine inférieur le calme était complet. Il ne restait qu'un peu de
lourdeur vague dans toute la tôle, et un léger degré d'état nauséeux tel qu'il
existait déjà avant les manœuvres neuriques. Il était alors onze heures et demie du malin ; je quittai la
malade très satisfaite de se
trouver ainsi débarrassée de sa migraine. A midi elle déjeuna comme
d'habitude malgré les petits malaises dont je viens de parler.
A deux heures de l'après-midi Mme X...
était débarrassée de tout malaise, très calme et aussi bien que
possible. Le soir elle reçut du monde et veilla jusqu'à minuit sans la
moindre fatigue.
La nuit du 16 au 17
janvier a été excellente, c'est une des nuits les plus calmes qu'elle ail eues depuis quelque
temps. Je la revis dans la matinée du 17
vers dix heures; elle venait de se réveiller et sa physionomie exprimait le calme le plus parfait et un grand bien-etre.
Cet accès n*a guère duré que
douze à quatorze heures, arrêté par
l'intervention neurique. Généralement lorsqu'ils sont livrés à eux-mêmes
sans intervention thérapeutique d'aucune sorte et même malgré l'emploi des remèdes les plus connus, les
accès de migraine durent trois jours chez Mme X..., un jour de
douleur aigue et deux jours d'une sorte de malaise
cérébral qui empêche toute lecture et toute occupation.
REMARQUES SUR
L'OBSERVATION XI
Cette observation
doit être l'approchée de l'observation X. Elle figure comme un nouvel exemple de guérison
de la migraine par les passes neuriques. Elle témoigne aussi en faveur de la
réalité d'une action neurique à distance.