De la Cause du Sommeil Lucide

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SÉANCE VII

DES PRINCIPAUX PHENOMENES QUE DEVELOPPENT LES PROCÉDÉSEXTERNES.

1. — En ayantl'apparence de rapporter aux procédés externes les phénomènes dont nousallons parler, nous prévenons qu'ils n'appartien­nent radicalement qu'àla concentration occa­sionnelle même. Elle seule les règle, etleur donne des nuances différentes, d'après ses diverses etincalculables modifications. Les pro­cèdes externes n'ont l'air d'ycontribuer, que parce qu'ils disposent les époptes naturels à cetteabstraction des sens, et font connaître par là que ces phénomènesne se développeraient pas, s'ils ne fournissaient pas d'occasion à l'es­pritdes époptes.

Les époptesmêmes les attribuent, à la vérité, à une puissance externe,tant dans leur état de veille que dans celui du sommeil. Mais n'ayant dans lesommeil qu'une liberté interne extrême­ment restreinte, et dans la veilleque des con­naissances oui seules entrent par les sens, ils n'ont point ledroit d'être crus sur parole, con­tre l'autorité des observations quidéposent le contraire. C'est au philosophe à rectifier leurs erreurs etle sommeil lucide lui fournit assez de lumières pour lui faire connaîtreque l'état d'in­tuition est tout à fait étranger à l'état desensa­tions, et que pour être mixte, il est sans cesse assujettiaux déviations des préjugés et des préventions.

Ce que nous avonsdit jusqu'à présent, et ce que nous dirons dans la suite avec plus dedétails, entourera de plus en plus cette vérité de l'éclat qui lui est naturel.En attendant, il suffira d'observer que, dans les personnes aptes au sommeillucide, la concentration occasionnelle est limitrophe de l'intuition ; quemême parfois elle en est accompagnée comme par habitude, et que, pour enignorer l'existence, elles ne sont pas toujours dignes d'une entièreconfiance dans tout ce qu'elles disent des causes et des effets de ce qu'elleséprouvent.

Les procédésexternes, de quelque nature qu'ils soient, sont toujours néanmoins néces­saires; et ils doivent aussi toujours être accom­modés au choix en faveurduquel les époptes sont prévenus. On pense communément que si l'on dort par lavertu d'un agent, ou si l'on en éprouve du moins des effets sensibles, on doity trouver une puissance qui réponde à l'idée qu'on en forme, ainsi quenous l'avons déjà observé ; nous avons aussi observé qu'on ne dort quepar sa propre influence, et qu'on n'est prompt à dormir que parce qu'onest doué natu­rellement de dispositions requises, c'est-à-dire, d'unecertaine liquidité extraordinaire du sang qui s'attache essentiellementà l'intuition et au sommeil. Ce n'est que cette dernièrecondition qui distingue le sommeil des époptes du som­meil ordinaire :autrement ils sont les mêmes en nature, l'un et l'autre.

2. — Il est doncinutile de répéter que les seuls procédés externes, sans la concentration, sontinsuffisants pour produire des effets, et que cette abstraction des sens, quiest incompatible avec les distractions tant volontaires qu'invo­lontaires, estune condition absolument néces­saire pour procurer du bien-être auxmalades, et provoquer le sommeil lucide. Voilà la principale cause de lanullité de l'action de ces procé­dés sur beaucoup de personnes qui s'y soumet­tent.Quoique le défaut de dispositions requi­ses les écarte d'en retirer lesavantages qu'ils présentent, néanmoins, par leur conviction habi­tuelle, ellesen tireraient encore quelque parti satisfaisant, si elles se livraient àune concentra­tion compatible avec leur situation.

Nous avons dit queces procédés soulagent les malades, et même guérissent de touteespèce de maux, lorsqu'ils ont des dispositions requises, ou que dumoins ils se livrent à une concentra­tion qui leur est possible ; maisil ne faut pas croire que ces signes sensibles rendent au corps un membre quilui manque, et rétablissent une désorganisation qui approche de la dissolution.On entend dire seulement que toute maladie qui ne provient pas du dérangementdes ressorts essentiels du coffre humain, ne résiste pas à leur action,quand même les attaques en paraî­traient insurmontables aux efforts de laméde­cine.

Il arrive souvent,et cela est aisé à compren­dre d'après ce que nous venons dedire, que de deux malades atteints des mêmes maux, et soi­gnés par lesmêmes procédés l'un guérit radica­lement, et l'autre reste dans son étathabituel, parce que la concentration occasionnelle, indépendamment de toutedisposition requise, a été différente dans l'un et dans l'autre. Cette con­centration,qui seule est l'agent principal de tous ces effets, a ses degrés et sesnuances, et vouloir simplement, sans un motif interne qui rende efficacecet acte de l'âme, ne suffît pas à un ma­lade pour atteindre le but deses souhaits. Il faut distinguer la volonté de la velléité, pour sentir ladifférence des effets qu'éprouvent tous ceux qui se soumettent àl'action de ces pro­cédés.

L'influence d'unevolonté externe, dont on se prévaut vulgairement pour expliquer lebien-être que recueillent les malades dans les procédés externes, estvictorieusement démentie tous les jours par l'expérience. Le malade qui se con­centreest toujours certain de retirer de cette action un bien-être quelconque,si le concentra­teur ne commet point par des expressions inin­telligibles uneperfidie de l'acte de sa volonté. Car, en raison de sa confiance sur lui, lemalade, sans s'en apercevoir, en suit les idées, et est sus­ceptible d'éprouverun mal proportionné à l'im­précation qu'il a entendue ; autrement, lavolonté du concentrateur est aussi nulle pour influer sur lui, qu'est nullel'action d'un objet malfaisant qui n'existe que dans la conception.

3. —La transpirationsuit toujours l'influence des procédés, externes. Quand elle est trèsabondante, elle annonce évidemment les appro­ches du sommeil. Cependant cetétat de repos ne la suit pas toujours, parce que d'autres entra­ves enempêchent le développement, entraves qui seront signalées dans uninstant. Le som­meil ne peut exister qu'à la suite de cet effet, parcequ'il consiste toujours dans l'épuisement des muscles, et conséquemment dansleur mobi­lité et leur flexion.

La transpirationn'est pas toujours humide et perceptible, souvent même elle estsèche et imperceptible. Dès lors il n'est pas aisé d'yreconnaître le signal des approches du som­meil.

Je n'ai pas besoind'observer que je ne fais le recensement de ces effets des procédés exter­nesque dans les personnes qui ont des dispo­sitions requises. Ceux qui s'ysoumettent sans cette condition indispensable pour parvenir au sommeil lucide,n'en retirent du bien-être que lentement, imperceptiblement etgraduellement. Rien n'annonce en eux des progrès visibles : ilséprouvent seulement un calme intérieur à la fin de chaque séance, ou dumoins au bout de quelques séances, en supposant qu'ils se livrent toujoursà une concentration oppor­tune.

La transpirationsèche ou humide est tou­jours indispensablement un effet de la concen­trationoccasionnelle ou libre. En général, les personnes replètes, qui ne sontpas ordinaire­ment cooptes, transpirent toutes les fois qu'el­les se livrent ausommeil. Elles n'en retirent pas les bienfaits qui suivent cet effet; parcequ'elles ne se plongent que dans une concen­tration qui a pour but lebien-être. C'est chez elles une action d'habitude et non de ré­flexion.

Nous avonsdéjà observe dans l'Introduction la nécessité du sommeil après unetranspira­tion violente, et de quelle manière cette néces­sité doitêtre conçue : nous remarquons ici que toute transpiration, surtout quandelle est abon­dante, est un signe précurseur de cet état de repus si l'ons'abandonne à une concentration quelconque. Les muscles que cetteévaporation épuise fléchissent déjà les uns sur les autres,jusqu'à ce que les soutiens des membres, pour se tendre,acquièrent de nouveaux sucs que leur fournit sans cesse la continuellecirculation du sang. Ainsi une sueur extraordinaire peut être considéréedéjà comme un commencement même du sommeil, parce que cet état deflexion des muscles n'est plus conforme à la constitu­tion naturelle del'homme.

Voilàpourquoi un malade qui transpire n'est jamais dans un état dangereux; il montrepar lu son aptitude au sommeil, qui est toujours un réparateur des forces,quoique moins efficace que le sommeil procuré par la concentrationoccasionnelle.

4. — La palpitationdu cœur est souvent aussi un effet des procédés externes, et c'est ellequi, en accompagnant la transpiration, empê­che le développement dusommeil. Elle agite le sang et détruit le calme interne sans lequel le sommeiln'existe pas; et si parfois il se ma­nifeste, il est ordinairement accompagnéde spasmes et de convulsions. Dans ce cas, ce sommeil n'est jamais lucide, iln'est qu'un engourdissement qu'on ne dissipe pas toujours avec facilité. Il estmême prudent d'empêcher que les personnes oui se livrent àla concen­tration occasionnelle ne tombent dans cette torpeur, en prenant laprécaution de les remet­tre dans leur état naturel aussitôt qu'on s'aper­çoitde cette agitation extraordinaire du cœur. Je dois même recommanderici au concentra­teur d'examiner souvent l'état du cœur de celui qui seconcentre, pour obvier aux crises.

La palpitation ducœur provient directement d'une crainte panique, et cette peur est plusparticulièrement le partage de tous ceux qui sont éminemment disposés ausommeil lucide. Par leur constitution physique, ils sont extrê­mementsusceptibles de se prévenir sans motif raisonnable ; et il en résulte que touten désirant ardemment par la volonté sensitive jouir du sommeil lucide, ilséprouvent une répugnance interne dont ils ne peuvent se rendre compte. Cettesensation est chez eux supérieure à tout effort pour s'en défendre. J'aivu des militaires de tout grade frémir et tomber dans des convul­sionsalarmantes au simple mot dormez, après avoir bravé au champd'honneur les sabres et les baïonnettes, les boulets et la mitraille.

Il est àprésumer que ceux chez qui ce symp­tôme pénible ne se manifeste pas, ne sontpas des époptes entièrement lucides. Quoiqu'il ne soit pas toujours uncaractère précis et distinctif de dispositions éminentes au sommeillucide, cependant il annonce dan» les fluides internes une mobilité si facile,qu'on dispose à volonté des époptes qui le développent, mêmemalgré eux. On ne trouve pas, en général, cette aptitude dans ceux qui neportent pas cette marque sen­sible ; et cette aptitude à maîtriser tousles mou­vements nécessaires du corps est le sceau de perfection de l'état desépoptes.

Du reste, lespersonnes qui exigent tant du ménagements de la part des concentrateurs, neparviennent paisiblement au sommeil lucide que par gradations, et par la répétition des actes. On lesfaçonne peu à peu à la concentra­tion : par l'expérience elles sedésabusent de leur préventions absurdes, et dans le moment où on s'yattend le moins, elle se plongent avec calme dans une profonde abstraction dessens. Cette conduite avec les époptes n'est jamais lon­gue, et s'ils seprêtent à la concentration une ou deux fois par jour, ils dormentle lendemain même, mais avec de l'agitation, et au bout de quatreà cinq jours ils se mettent au niveau de ceux qui sont déjàaguerris, et deviennent lucides.

5. — Il esttrès présumable qu'un délieraient du sang, lent et progressif, quidispose au som­meil lucide, provient aussi de l'usage des pro­cédés externes.Plus le sommeil est profond plus il est apte à réparer les forcesperdues. Si les procédés externes ont la vertu de guérir toute espèce demaux, ils ne peuvent manquer de contribuer au déliement du sang qui est lasource de la santé. Les maladies, quelles qu'elles soient, proviennent toujoursd'entraves dans la circulation libre et naturelle des fluides inter­nes.

Il est certain aussique le sommeil lucide, qui n'est qu'un indice évident de la faiblesseorganique, est une maladie qui entraîne vers la tombe ; mais c'est une maladiequi s'approche le plus de l'état d'équilibre des fluides et des solides ducorps humain. Nous avons déjà remarqué que 1 homme, en naissant,appartient ou à l'état d'engorgement ou à celui de faiblesse, etqu'il doit regarder ce dernier état comme préférable; au premier pour laconservation de son existence. C'est un mal inévitable, mais c'est le moindredes maux qui l'entourent et qui l'entoureront toujours.

Il est facile desentir maintenir la raison pour laquelle des personnes qui se soumettentà l'in­fluence des procédés externes, sans dispositions au sommeillucide, finissent Quelquefois par devenir époptes. Mais leur lucidité est engéné­ral très bornée. La liquidité que leur sang ac­quiert par ce moyenn'est jamais telle que la produit la nature spontanée, quelle que soit la causeexterne qui l'y pousse. Toutefois l'état où cette liquidité placel'épopte lui est suffisamment avantageux, si le concentrateur est assez habilepour en tirer le parti qu'il lui présente.

Il ne faut pascroire cependant que tous ceux chez qui le sommeil lucide se développe àla longue, sont dans le môme cas que ceux dont le sang se délie graduellementsous l'influence des procédés. Nous venons d'observer que plu­sieurs personnes,avec les dispositions requi­ses, ne dormaient quelquefois pas en raison deleurs préventions qui sont autant d'entraves au développement du sommeil, etqu'elles ne s'en désabusaient que par leur propre expérience et à lalongue. Les procédés externes n'ont plus rien à délier dans leur sangdéjà liquide naturel­lement ; mais ils les dépouillent de leurs préju­géset les façonnent à regarder leur influence sous son véritable point devue.

Les conséquences quidécoulent de la considé­ration de ce déliement du sang seraient tout àfait indépendantes de tout ministère étranger, si l'homme pouvait sepénétrer profondément du principe qui les provoque. Mais, malgré son orgueil,ils pensent que d'autres peuvent avoir des lumières qu'il n'a pas, etnéglige les res­sources que lui offre sa propre constitution.

6. — Des éclats derire, des sanglots et des pleurs sont aussi des effets des procédés exter­nes.Il faut bien se garder de les traverser : il faut, au contraire, leur procurertout l'essor pos­sible pour se consommer, jusqu'à ce que la per­sonnesouffrante annonce elle-même son soula­gement et sa tranquillité ;autrement on l'expose à des suites souvent si désastreuses, quel'œil médical, en attribuant à d'autres causes qu'aux causeslégitimes, les convertit ordinairement en des maux inguérissables.

Toutes les fois queles impressions que les organes internes ont reçues d'un excessif contentementou d'un profond chagrin, res­tent étouffées au fond du cœur, ellestrouvent dans le calme interne que produit la concentra­tion, la liberté desuivre leur direction primitive et d'éclater d'une manière violente.Celui qui éprouve ces effets est toujours forcé de s'aban­donner à leurélan, sans pouvoir aucunement les maîtriser au gré de ses désirs, de la mômemanière, à peu près, que nul homme n'est apte àarrêter la perception dans l'âme, dès qu'il y a une sensation dansles organes externes ; parce que leur cause ayant passé dans l'état intuitif del'homme, devient tout à fait indépen­dante de sa volonté sensitive.

Ceux qui éprouventcette espèce de crise, et ce sont plus souvent les personnes du sexeféminin que du masculin, ne parviennent pas ordinairement jusqu'au sommeil ;parce qu'avant que le calme qui provient de la concentration ne se développe,le sang se trouble, s'agite et en écarte les approches. La guérison de cetteespèce d'affection dépend uniquement de la con­centration par lesprocédés externes: elle disparait aussi facilement devant ce traitement simpleet décisif que tous les autres maux phy­siques.

C’est de cetterépression d'inquiétude et de chagrins, plus souvent que de joie et de con­tentement,que dérive ordinairement la forma-don de ces pierres que les médecins trouventquelquefois dans l'ouverture des cadavres des personnes colériques etirascibles par tempéra­ment. Ce ne sont que des humeurs hétérogènes qui,étant comprimées dans leur circulation, s'arrêtent dans un lieu déterminédu corps, et s'y consolident comme une espèce de pétrifica­tion. Jepense de même qu'une grande partie des femmes qui souffrent de glandes ausein, ne donnent naissance à ces glandes que par cette même cause,plus commune chez elles que chez les hommes en raison de la facile mobilité deleurs fluides.

Je dois ajouter auxcrises d'éclats de rire, de sanglots et de pleurs qui proviennent parfois deprocédés externes, celles de suffocation de poitrine et de provocation auxvomissements. Elles empêchent, comme les précédentes, le développement dusommeil, et exigent aussi la liberté du corps qui leur convient,c'est-à-dire l'état naturel pour respirer et pour évacuer. Ce sont aussiles préventions qui les provoquent, mais en modifiant les fluides internes.

7. — Il résulteaussi quelquefois des procédés externes une clôture d'yeux qui est difficileà régler à volonté; il faut même souvent que leconcentrateur emploie le ministère des doigts pour remettre lespaupières dans l'exercice de leurs fonctions naturelles. On croitvulgairement que c'est un effet qui annonce la proxi­mité du sommeil ; dans laréalité c'est un indice qui fait pressentir les entraves qui s'opposent audéveloppement de cette abstraction des sens. Avec le temps on y parvient quelquefois,mais c'est par des raisons que nous avons alléguées haut ; c'est-à-dire,par le délieraient du sang que les procédés externes ont le droit d'établirdans le corps.

La clôture des yeuxdans la concentration occasionnelle annonce une liquidité du sang dans larégion optique, mais non telle qu'il la faut pour l'existence du sommeil lucide; car elle n'est ni extraordinaire, ni générale dans la majo­rité de sa masse.Nous avons observé dans l'In­troduction qu'il faut du sang extrêmementliquide pour être épopte, et extrêmement épais pour etre-cataleptique; et que sa densité chez les premiers, et sa fluidité dans lesseconds sont toujours en raison directe de leurs contraires. Si ceux qui dansla concentration occasionnelle éprouvent la simple clôture d'yeux, n'ont qu'uneliquidité intermédiaire du sang, il est clair qu'ils n'ont de dispositions nià être époptes, ni à être cataleptiques.

Les épreuves quej'ai déjà faites sur des cata­leptiques, déjà convalescents, maisnon tout à l'ait remis dans leur situation naturelle, appuientcomplètement ce que je viens de déduire. Ils éprouvent, étant soumisà la concentration occasionnelle, le môme effet de clôture d'yeux queceux dont je viens de parler, et ils ont encore plus de difficulté que lesautres à les ouvrir. On ne peut pas soupçonner qu'ils soient des époptesplutôt que des cataleptiques ; parce qu'ils ne transpirent qu'avec beaucoupd'agitation, et qu'ils conservent encore la jouissance d'une intuitionlégère dans leur état de veille.

C'est que la solutionqui détruit la grande den­sité de leur sang, n'est encore ni assez liquide pourles remettre dans l'état des époptes, ni suffisante pour les détacher toutà fait de la ca­tégorie des cataleptiques. Etant soumis à laconcentration occasionnelle, ils en éprouvent quelques effets, mais non telsqu'il convient aux époptes. Ainsi, lorsqu'ils ferment les yeux par cesprocédés, ils les tiennent toujours si serrés, qu'ils résistent longtemps auxefforts de tout secours étranger. C'est ce qui précisément fait voir que s'ilscoïncident, en raison de la nature de leur sang, avec ceux qui n'éprouventque la clôture d'yeux par la concentration occasion­nelle, ils endiffèrent aussi dans la force de l'ef­fet en raison des degrés deliquidité ou de den­sité de ce suc vital.

8. — Si les procédésexternes consistent seulement dans les attouchements et dans les frictions, ilsproduisent quelquefois la commu­nication réciproque des mots contagieux, lors­quele concentrateur, ou la personne concentrée, ou tous deux en sont atteints. Ceteffet tient à la nature môme de la transpiration. Le méca­nisme despores, pour pomper et émettre des corpuscules, est le môme que celui de labouche et des narines pour aspirer et respirer, et il en résulte que si unepersonne saine et bien por­tante louche un malade contagieux ou même seplace à côté de lui pendant sa transpiration, elle se trouve toutepréparée à pomper ses hu­meurs malfaisantes.

C'est la raison pour laquelle la prudence recommandeimpérativement d'empêcher que les enfants ne couchent avec lesvieillards. Quoique les premiers soient plus faciles à trans­pirer queles seconds, néanmoins ceux-ci cou­vent encore plus d'humeurs morbifiques queceux-là. Ce que les enfants communiquent aux vieillards n'a donc rienqui ne soit extrêmement salutaire ; parce que telle est essentiellementla nature de l'homme exempt de maux ; mais ce que les vieillards communiquentaux enfants est un poison si subtil, qu'il corrompt imman­quablement la massede leur corps. Aussi il arrive toujours que les uns et les autres tro­quentréciproquement leur santé : les vieillards se fortifient, et les enfantsdépérissent.

L'aspiration descorpuscules ambiants, pen­dant la concentration, trouve encore une facilitéparticulière dans les époptes, en raison de leur sensibilité exquise,l'action de l'âme étant immé­diate et directe sur toutes les parties du corpspendant le sommeil, les miasmes externes qui se trouvent aspirés, agissentaussitôt sur ce prin­cipe moteur; et, sans avoir besoin d'un temps déterminépour se développer comme dans l'état de veille, ils font des ravagesdésastreux. Dans le sommeil naturel, quand même il serait lucide, ceteffet n'est pas aussi prompt, parce qu'on n'y a pas la connaissance de ladirection, et que la liberté interne y est encore plus restreinte.

J'ai vu de sitristes exemples de ces effets dans plusieurs des époptes que je soignais, lors­qu'ilfallait les mettre, d'après leur avis, en con­tact avec des maladescontagieux, nue je me suis trouvé forcé de ne plus permettre les attou­chementsqu'après des précautions rigoureuses, et suffisantes pour parer aux inconvénients. Il est arrivé plusieurs foisdans ce genre de con­sultations, que des époptes, les uns sont tombés dans desconvulsions, les autres ont perdu leur lucidité, et d'autres enfin ont pendantplusieurs mois aggravé leurs maux. Cependant il est cer­tain que le simplecontact dans les consultations diffère encore beaucoup des attouchementsdans les procédés pour concentrer et en raison de la durée du temps, et enraison de la transpiration qui y est presque permanente.

9. — Le sommeil estle sublime et le dernier effet des procédés externes. Il est toujours plus oumoins lucide et se développe plus tôt ou plus tard. Ceux qui dorment dèsla première concen­tration, quoique d'ordinaire au milieu des agi­tations,sont toujours plus lucides que les autres qui parviennent à cet étatd'abstraction des sens après quelques séances. Ils annoncent des dis­positionséminentes qui l'emportent toujours sur les entraves de la crainte et surd'autres préven­tions qui en empêchent le développement.

Il ne faut pas pourcela se persuader que leur lucidité soit sans inconvénients ; il faut, au con­traire,se mettre dans l'esprit que, dans la con­dition actuelle de l'homme il est absolumentimpossible qu'une vérité occulte, inaccessible aux sens soit jamais un objetexact de l'intui­tion des époptes. Le plus lucide d'entre eux est celui qui enapproche le plus, et s'y trompe le moins. Les obstacles qui s'y opposenttiennent à la manière même dont se développe cette facultémerveilleuse.

Le secret d'en tirerun parti avantageux dépend entièrement de l'adresse du concentra­teur,et non du zèle de l'épopte lucide. Le temps met, à la vérité, cedernier à même de s'amélio­rer dans l'exactitude de ses annonces ;mais il ne l'éclairé jamais assez pour le rendre infail­lible. C'est auconcentrateur à prendre le» mesu­res opportunes pour le diriger dans lavoie de la certitude : et quel est celui qui peut se vanter de se connaîtredans cet inextricable labyrinthe? (le qu'il y a d'assuré, c'est qu'un époptelucide, bien dirigé, est toujours à même de dévoiler une véritéavec tous ses accessoires, quelque épaisse que soit l'enveloppe qui la dérobeà la connaissance humaine ; mais on ne peut nulle­ment espérer que, parses seules forces, il l'at­teigne dans tout son éclat et dans toute sa réa­lité.

Ceux qui pensentqu'en possédant un épopte lucide ils peuvent faire des prodiges, se trompentdonc bien grossièrement. Ils doivent môme faire avec lui plus desottises que d'autres avec un épopte légèrement lucide. Les premiers, enlui inculquant l'idée avantageuse qu'ils s'en forment ne peuvent manquer deflatter son orgueil, vice commun à tous les époptes, et de l'induireà don­ner dans la solution des questions soumises, comme un objet de sonintuition, ce qui n'est qu'un résultat de son raisonnement faux et erroné.

Oui, il fauttoujours se prévenir contre le rai­sonnement de tout épopte, quelque lucidequ'il soit. On ne doit le consulter que sur ce qui tombe sous son intuition clnon sur ce qu'il juge. Toutes les idées qu'il a sans la présence de leursobjets, sont toutes originairement sensitives et converties en intuitives. Cequ'il décide par elles n'est qu'une consultation que tout autre donne­rait dansson état de sensations. Si ensuite ces idées ne proviennent que des préjugés,le raisonnement qu'elles établissent ne peut être que faux et erroné.

10. — Le sommeillucide se développe ordi­nairement les yeux fermés ; mais il est des per­sonnesqui dorment les yeux ouverts, et mes observations m'annoncent que tous ceux quidorment de la sorte sont des époptes naturels. Les yeux ouverts chez eux sonttoujours immo­biles ; ils ont l'apparence d'être cristallisés et nejouissent point de la vision. Toutefois, il y en a qui les meuvent et voient cequi se passe devant eux, mais sans en garder la mémoire à leur réveil.Leur nombre est si petit qu'ils peuvent être regardés comme une merveilledans cet espèce de phénomènes.

Il y en a aussi danscette catégorie qui, sans être cataleptiques, dorment pendant des annéesentières en remplissant toutes les fonctions qui conviennent àleur âge, à leur état et à leur sexe, au point qu'on a de lapeine à croire qu'ils ne sont pas dans leur parfait état de sensations.Etant éveillés au commandement, ils décèlent un état d'imbécillité, neconnaissent rien de ce qui les entoure, et rapportent tout à l'époquequi a précédé leur sommeil. Dans les réveils intermé­diaires, ils ne seremettent que ce qu'ils avaient vu dans, le temps de leur état habituel deveille.

Parmi ceux quidorment les yeux fermés, il en est qui dorment aussi les yeux ouverts au gré duconcentrateur. Il parait qu'ils n'ont pas natu­rellement l'habitude de cetespèce de sommeil, parce qu'ils disent souffrir dans la prunelle, etdemandent qu'on leur ferme les paupières s'ils sont retenus quelquetemps dans cette situation curieuse. La singularité de cette manière dedormir dépend sans doute du défaut d'élasticité des fibres qui se tendent dansla région optique, défaut qui expose la contexture des yeux à unedétérioration graduelle. La clôture des pau­pières pendant le sommeiloù l'homme, en per­dant la liberté de régler les fonctions des orga­nes,se trouve hors d'état de les défendre, est un bienfait de la nature, d'autantplus précieux que l'organe visuel plus que les autres a besoin d'unesurveillance toute particulière.

Il arrive aussi quedes personnes qui tombent une fois dans le sommeil sous l'influence desprocédés externes ne dorment plus dans les tentatives postérieures. Cetteparticularité vient du changement survenu dans la liquidité du sang ;changement qui sert d'obstacle au déve­loppement du sommeil suivant. Le sangvarie souvent avec une telle rapidité que l'on voit quelquefois des époptes,chez qui ce principe vital est en grande partie extraordinairement liquide,passer tout à coup aux évanouissements et même à lacatalepsie, et, quelques minutes après, revenir une seconde foisà l'aptitude du sommeil lucide. Nous avons remarqué que ces crises nesont que des résultats de la densité du sang. Il est certain aussi que despersonnes qui ont éprouvé momentanément la liquidité du sang retombentaprès dans un état ordinaire de sa densité.

11. — Le sommeillucide n'est qu'un état de songes, et conséquemment il se fait connaître pource qu'il est à toute personne... qui est susceptible de songer. Toutesles fois qu'on grave la mémoire des époptes de ce qui se passe dans le sommeil,ils le rapportent gênéralement à leur réveil, comme un songe quileur a représenté une scène. Aussi les anciens caractérisaient justementde songe le sommeil lucide, en raison de l'identité de leur nature, quoiqu'ilsdiffèrent dans leurs nuances de netteté et d'exactitude.

Il est donc clairque l'intuition des époptes est la même que l'intuition de ceux quisongent, et que, consequemment, elle ne peut leur pré­senter les objets quesous les espèces ; c'est-à-dire, sous des images qui lespeignent et les représentent. Elle est donc justement appelée mixte ; parceque, tenant lieu de sens, elle est très éloignée de se confondre avec l'intuitionpure, qui n'est qu'une propriété des esprits, indépendants de lamatière, quelque inconce­vable que soit la manière dont elle sedéveloppe.

Il est donc clairaussi qu'il est impossible que, la pensée d'autrui, qui d'elle-même n'aaucune forme sensible, puisse être l'objet de l'intuition des époptes,quoi qu'il soit indubitable que quelques-uns d'entre eux en aient souventatteint les objets, et dévoilé ce qui est le secret du seul esprit. Ce qu'ondébite vulgairement à ce sujet n'est qu'un paradoxe qui a tout lecaractère d'une absurdité. C'est un phénomène qui a besoin dedéveloppement, et qui sera expliqué dans la suite d'une manière satisfai­sante.

Il est donc clairaussi que si les songes, par la représentation des objets qui n'agissent passur les sens, produisent des sensations réelles et effectives, correspondantesà chaque sens, à plus forte raison le sommeil lucide, qui est lecomplément du songe, doit produire sur les époptes des sensations réelleset effectives, correspondantes àtous les objets des cinq sens qui, sans agir physiquement sur les organesrespectifs, ne sont représentés à leur esprit que par le concentrateur.Ce qui y parait inconce­vable, quoique physiquement explicable, comme nous leverrons, confirme donc la bonne foi du concentrateur.

Il est donc clairenfin que si les sourds, les muets et les aveugles, sont susceptibles de son­ger,ils doivent de même entendre, parler et voir, et que, dans l'état dusommeil lucide, ils doivent tous remplir toutes ces fonctions avec une facilitéplus merveilleuse encore, en raison de la perfection que donnent à cetétat les dis­positions physiques. Ce sont des conséquences de principesévidents, et non les résultats des expériences. Toutefois je suis persuadé queces déductions ne peuvent pas manquer d'être jus­tifiées par lesuccès. Il n'y a donc pas d'impos­sibilité que les époptes soientsusceptibles de guérison de toute espèce de maux, sans aucun traitementeffectif.

12. — Mais onm'objectera que le sommeil lucide ne laisse pas au réveil la mémoire de sondéveloppement comme le songe, et que par conséquent on ne peut pasraisonnablement confondre l'un avec l'autre, même quant à lanature.

Cette différenceapparente provient do toute autre cause que de la différence réelle de cesétats. Il est constant chez les psychologistes que la vie de l'âme gît dans lapensée, et que consé­quemment elle pense nuit et jour, pendant qu'elle songe etpendant qu'elle ne songe pas. Il est cer­tain, si l'on y réfléchit bien, quel'homme même dans son état naturel, n'a la mémoire que de ce qui attireson attention, et que plus cette atten­tion est repliée sur son objet, plus lamémoire est fidèle et a de la durée. La mémoire, par elle-même,n'est donc que le repli de l'attention sur son objet.

Nous avonsdéjà observé plusieurs fois que dans les personnes qui dorment larestriction de la liberté interne est extrême, c'est-à-dire,qu'elles peuvent s'en servir par une impulsion spontanée, mais non par l'habitude,comme dans l'état de veille, par le défaut d'en sentir l'existence. Le plussouvent on y pense sans aucun égard ni à l'objet de chaque idée, nià la liaison de toutes. Elles se suivent plus par l'ana­logie d'une idéeà l'autre que par une analogie de toutes les idées à laprincipale. On y pense con-séquemment sans aucune attention.

La portion de lacontinuité de la pensée se convertit en songe dès quelle attirel'attention de l'âme ; et cette attention ne tombe d'ordinaire que sur lessimples objets des idées, rarement sur la liaison des idées, car il est despersonnes, comme les époptes chez, qui la restriction de la liberté est moinsgênante, et qui songent sou­vent conséquemment et décèlent avecexacti­tude des vérités occultes. Voilà la raison pour laquelle lessonges laissent dans l'état de veille la mémoire de ce qu'ils représentente, etsont ordinairement décousus dans la contexture de leurs éléments.

Les époptesmêmes, qui étant éveillés ne se rappellent rien de ce qui s'est passédans leur sommeil, confirment cette théorie. Ils gardent la mémoire, de tout cequ'on désire dès qu'on leur enjoint dans le sommeil d'y replier leurattention pour s'en rappeler au réveil. Cette expérience n'a plus lieuordinairement sur les nouveaux époptes ; parce que se trouvant dans unetrès grande restriction de leur liberté interne en raison surtout del'engourdissement de leurs membres, ils ne sentent pas le poids des injonc­tionset l'obligation de l’obéissance. Toutefois il y en a qui replient leurattention sur ce qu'on leur recommande ; et tous sont également aptes àla replier spontanément lorsqu'une impulsion interne les y pousse, ainsi qu'ilarrive dans les songes.

13. — Cetteobservation redresse l'erreur de ceux qui pensent qu'un épopte ne dort pas pro­fondément,lorsqu'à son réveil il se rappelle ce qui a été dit ou fait pendant sonsommeil. Tout épopte, dès qu'il est épopte, c'est-à-dire,dès qu'il jouit de 1 intuition, dort plus profondément que ceux qui sontdans le sommeil ordinaire de la nuit. Cependant il est incontestable queceux-ci ne se rappellent point ce qu'ils ont répondu aux questions qu'on leur aadressées. Donc il est certain que la mémoire de ce qu'on dit dans le sommeiln'en prouve pas plus la légèreté que l'oubli n'en prouve la profondeur.

Les époptes dansleurs premiers sommeils dor­ment ordinairement avec une sorte d'inquiétude surleur état ; et tout en dormant profondément, ils conservent, par ce motif, unplus ample exercice de leur liberté interne que ceux qui donnent sans aucun souci.Cet exercice facilite le repli de leur attention sur tout ce qui se passeautour d'eux pendant leur sommeil, et leur en laisse la mémoire au réveil.L'habitude les rassure sur ce point ; ils dorment ensuite avec calme ; le replide leur attention n'a plus de sujet, et au réveil la mémoire n'y trouve plus latrace des impressions.

Tout épopte qui dortavec la connaissance de son sommeil (et il y en a, quoiqu'ils soient rares),conserve aussi la faculté de replier son attention sur tout ce qu'on lui dit eten garde la mémoire. J'ai dit que ces époptes sont rares, parce qu'en dormantavec calme ils deviennent en général étrangers à leur état desensations, et regardent leur situation présente comme un état habituel. Lamémoire que gardent les épop­tes à leur réveil dans les commencements deleurs sommeils, ne prouve donc pas qu'ils ne dorment que légèrement.

C'est par cetteraison que, sans être épopte, on se réveille la nuit ou le matin àpoint nommé, lorsqu'en se couchant on se livre au sommeil avec la crainte demanquer à l'objet de son idée. Toute personne a pu faire cette épreuve,et a dû trouver que le succès répondait constam­ment à sonattente. Une idée ruminée avec zèle et intérêt, dans l'état desensation passe toujours en intuition, et fait à l'esprit un devoir decon­tribuer de son mieux à y répondre malgré toute la restriction de saliberté interne. Cette liberté se prête dès lors àl'exercice de tous les moyens nécessaires à l'exercice du projet, etreste subor­donnée à l'impulsion qu'il y donne.

Ainsi ce que nousavons appelé impulsion interne n'est qu'un effort de l’âme qui, sans songerà la gêne de sa liberté, tâche de ployer le corps àatteindre le but de sa conception. Elle ne l'y ployerait pas si elle avait unepleine con­naissance de sa situation : elle n'en surmonte les obstacles que parl'habitude. Ainsi l'impulsion interne, qui étend la restriction de la li­berté,doit toujours être mesurée sur l'intérêt que l'âme attache auprojet qu'elle veut exécuter.

14. — Une réflexionimportante se présente ici relativement à l'influence de la densité etde la liquidité du sang sur la nature de la mémoire. C'est qu'elle n'a pas lemême siège chez toutes les personnes, et que dans la mêmepersonne, elle varie suivant la disposition de son sang. La mémoire n'ad'existence que dans les lieux où le sang est extrêmement liquide,et ce fluide pouvant être disposé de la sorte en plusieurs fois, ellepeut aussi exister à la fois dans plu­sieurs lieux de l'enveloppehumaine.

Ces lieux sont laglande pinéale, les deux tempes, la descente de l'os frontal sur le nez, lediaphragme, le cœur, et peut-être aussi d'autres parties qui noussont inconnues. Les pieds entrent aussi dans ce recensement, mais ils sont lesseuls presque constants dans cette fonction, et ne varient pas ; par làils présentent un siège qui est commun à tous les époptes. Entouchant tous ses membres, avant d'apprendre de chaque épopte le lieu précis dece siège, on lui grave dans la mémoire ce qu'on veut qu'il se rappellede son sommeil.

La densité du sangqui survient n'efface pas tout à coup les traces des impressions reçues,mais elle les altère graduellement et engendre l'oubli. Il paraîtrait,d'après ces observations, que ce n'est pas le cerveau qui donnel'existence à lu faculté de la mémoire, ainsi que le pensentgénéralement tous les physiologistes, mais tout autre principe qui n'y a aucuneanalogie. Je n'oserais taxer d'erronée une opinion générale, mais je ne puisnon plus la regarder comme une vérité constante, dès qu'elle est en oppositionavec l'évidence de l'expérience et des observa­tions. La lésion du cerveaualtère à la vérité la mémoire, mais elle altère aussitoutes les facul­tés de l'âme.

Il est indispensablede faire à cette occasion une distinction entre la mémoire et le souvenir,quoique dans l'acceptation commune ces deux mots semblent êtreparfaitement synonymes. Nous appellerons souvenir ce rappel d'idées quiest indépendant de toute trace des impressions, et mémoire ce rappeld'idées qui est absolument subordonné à un tableau de représentationsd'i­mages. Le premier est celui qui convient aux seuls époptes dans le rappeld'idées d'un sommeil à un autre, parce qu'il regarde le seul espritindépendamment de tout intermédiaire et n'a nul exercice dans l'état desensations. La seconde est celle qui convient à l'homme dans son étatnaturel ; et étant purement matérielle, elle suit toujours les dispositions deson état physique. Cependant les époptes sont aussi sujets à l'oublidans leur sommeil ; mais l'étant également dans l'état de sensationsrelativement à ce qui se passe dans leur abstraction des sens, ils sedistinguent aussi, à cet égard, des autres hommes dans leur étatnaturel.

Ceux qui ontcontribué au perfectionnement des langues par leurs écrits et par leurs ouvra­ges,n'admirent pas cette différence entre le souvenir et la mémoire, parce qu'ilsne con­nurent pas la nouvelle idée que présente le phénomène du sommeil.De nos jours cette distinction devient une nécessité pour préciser le rappeldes idées des hommes et celui des époptes dans leur état d'intuition.

 

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