De la Cause du Sommeil Lucide

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SÉANCE VI

DES DIFFÉRENTSPROCÉDÉS EMPLOYÉS EN TOUT TEMPS POUR SOULAGER LES MALADES ET POUR ENDORMIR.

Il parait que tousles peuples anciens et modernes ont reconnu dans une certaine liqui­ditéextraordinaire du sang le principe de la conservation de la santé, et mêmedu soulage­ment et de la guéri son des maux. Du moins, l'usage de masser, quiexiste et a existé chez presque tous les anciens peuples, appuie cetteprésomption, déjà convertie en certitude par les observations sur l'étatdes époptes. Dans la pratique de masser, on ne cherchait sûrementpas toujours comme un objet principal la con­centration occasionnelle ; maisseulement la cause d'où elle dérive, comme la source d'unbien-être. Voilà la raison pour laquelle nous réunissons lesprocédés de l'action de masser, ceux qui provoquent le sommeil lucide etses accessoires, et même le soulagement et la gué­rison des maux. Toutela différence entre les uns et les autres, consiste en ce que ceux-ci supposentet produisent aussi à la longue la liquidité du sang, et queceux-là la procurent sur le moment même.

Masser est presserles chairs, comprimer les muscles, procurer au sang une circulation facile. Les Romains en connaissaient si bien l'usage, qu'ils en faisaient unepratique de luxe. Ils l'appelaient amollir, du mot latin malacissare.D'après les reproches de Sénèque1, il paraît mêmeque l'abus en était poussé au dernier degré de scandale. Martial fait en peu demots la description de cette action, en disant que des femmes pressaientlégèrement le corps, et que les membres ressentaient un bien-êtrede ce bienfait de leurs mains2. Je présume que les Romains neconnurent ce raffinement de mol­lesse que depuis qu'ils eurent commerce avecles Asiatiques. On sait que ces peuples excel­laient dans la recherche de toutce qui pouvait ajouter à leurs plaisirs, pendant que les peuplesoccidentaux se suffisaient à peine pour procu­rer le strict nécessaireà la conservation de leur existence.

M. Grose, dans sonvoyage aux Indes orien­tales, l'ait une description très détaillée de cemoyen qu'il appelle l'art de pétrir les membres. Il (lit que lesindigènes font craquer toutes les jointures des poignets, des genoux etmême du cou. « On peut, ajoute-t-il, s'en rapporter entiè­rementà eux : ils sont de la plus grande adresse. On est persuadé que cetteopération rend les membres plus souples et facilite la circulation des fluides,qui, sans cela, croupissent et n'ont pas leur mouvement assez libre àcause de la trop grande chaleur. »

MM. Osbeck etTorceu, dans leur voyage commun en Chine, rapportent que cet usage esttrès fréquent chez les habitants. Ils ajoutent que « l'exercice de cesfonctions est un apanage exclusif des barbiers, et qu'ils s'en acquittent avecune telle adresse qu'ils gagnent tous les jours de plus en plus la confiance dupeuple. »

Le capitaine Cook3,dans ses voyages à l'île d'Otahiti, donne aussi beaucoup de détails surle même sujet : « Les voyageurs qui étaient descendus à l'Ile,lit-on dans la relation, après avoir fait une grande incursion dansl'intérieur du pays, s'étaient réunis dans une espèce de hangar pour sedélasser en se livrant au plai­sir de la table. Un grand nombre de parents denotre ami, ajoute-ton, s'assirent à l'instant près de nous ; etsa fille, qui, par l'élégance de ses formes, par l'agrément de ses traits etpar la blancheur de sa peau, égalait et surpassait peut-être toutes lesbeautés que nous avions vues jusqu'alors à Otahiti, souriait amicalementen nous regardant. Elle fit beaucoup d'efforts, ainsi que ses jeunes compagnes,pour nous être agréables. Afin de nous délasser, elles frottè­rentde leurs mains nos bras et nos jambes ; et, elles pressèrent doucementnos muscles entre leurs doigts. Je ne puis pas dire, poursuit le voyageur, sicette opération facilite la circulation du sang ou rend leur élasticité auxmuscles fatigués ; mais son effet fut extrêmement salu­taire. Nos forcesfurent entièrement rétablies, et la fatigue du voyage n'eut pas delongues suites. »

Le capitaine Wallis,qui avait essayé le même remède, parle de môme de son efficacité,en rendant compte de la généreuse hospitalité des Otahitiens4.

A la suite rie cestémoignages, je puis ajouter l'usage que j'ai fait moi-même à Goa,de l'action de masser dès l'enfance jusqu'à l'âge dequinze ans. cette pratique est si universelle dans les Indes, que toutes lesfamilles la regardent comme le premier moyen de guéri son, ou du moins de ladécouverte de la nature des maux. Il en est de deux sortes : l'une de nécessitécon­tre les maladies, et l'autre de luxe pour le raffi­nement de la mollesse.Je crois que c'est cette dernière qui était l'objet des invectives deSénèque contre les Romains.

Les voyageurseuropéens qui en ont fait d'amples descriptions ont toujours confondu lune avecl'autre, sous le nom générique d'ac­tion du masser, ou plutôt ils n'ontconnu que la seconde, qui ne tend qu'à conserver cl garantir la santé,en chatouillant agréablement les sens, et eu provoquant le plus souvent unsommeil doux et calme, mais léger et facile au réveil. La première, quiconcerne seulement la manière de connaître l’espèce et la naturedes maladies, était plus digne de l'attention d'un observateur. Nous allonsdonner ici une description détaillée de l'une et de l'autre, en commençant parl'ac­tion de masser de nécessité, comme celle qui a le plus de droit depiquer la curiosité du lecteur.

3. — Dèsqu'on se plaint d'un malaise, même d'un mal de tète, on estcontraint par les parents de se coucher sur une natte étendue. Le malade s'ytient le ventre, et un homme robuste lui serre le front avec une bande épaissede lissu de coton, de la largeur à peu près de quatre doigts, enla tordant graduellement avec lenteur au moyen d'un petit bâton de la longueurd'un pied. Les deux bouts de la bande arrêtent cette manivelle dans leurnœud, et doivent se trouver toujours derrière la tète dumalade pendant toute l'opération. Le malade est obligé d'endurer cette tortureautant que son courage peut le per­mettre. Aussitôt qu'il donne des signesd'une dou­leur vive, l'homme à l'opération s'arrête pendant une oudeux minutes, détache ensuite la bande, et, dans la même direction ilenserre légèrement la tète avec un ruban.

Cette torture doitavoir lieu de la même ma­nière sur les épaules, le ventre, lesreins, les cuisses, les genoux, les mollets, les talons et sur les doigts depied. Les bras doivent être compris aussi dans les tortures qui peuventles embrasser, de sorte que les doigts des mains doivent se trouver soumisà celle des reins. Le serrement du ruban n'est utile qu'à latète ; il n'est pas employé ailleurs. Le reste du corps n'a besoin qued'être garanti des courants d'air par une couverture, et il faut avoir laprécaution d'entremettre du linge dans les endroits où le froissementdes membres est indispensable.

A la suite de cetteopération pénible, on met les talons du malade, l'un après l'autre, etpar instants, dans de l'eau extrêmement chaude, à plusieursreprises, et on les essuie chaque fois avec un linge. Le malade prend, après ce petit bain,de l'eau de riz extrêmementchaude et sucrée, en guise de thé, et se couvre dans son lit de plusieurscouvertures pen­dant un quart d'heure pour transpirer. La sueur qui résulte detous ces violents prélimi­naires exige un changement successif de linge, etprovoque dans la nuit un sommeil calme et paisible. Si le mal était léger ildisparaît le len­demain ; et s'il était grave il décèle dans cet inter­valletous les symptômes et le caractère de sa nature.

Dans ce dernier cas,le médecin s'empare du malade, et d'ordinaire il le délivre de la cause de sessouffrances en raison de ces précautions salutaires. Ce qu'il y a de constant,c est que des vieillards centenaires sont communs dans ces contrées, et que lesmaladies chroniques y sont rares. Ces longévités qui y sont remarquables danspresque toutes les familles dépendent aussi, sans contredit, de la grandesobriété de la vie, et en raison de ce principe, nulle maladie n'y est engénéral tenace et opiniâtre. En effet, si l'on réfléchit bien, on trouvera queces décrépitudes extraordinaires que parfois on cite en Europe n'existent quedans les familles pauvres et sim­ples, c'est-à-dire dans une classed'hommes aux­quelles le défaut de fortune prescrit un genre de vie économique,et par conséquent régulier. Il est rare que les riches y vivent de longuesannées.

Ce genre de masserest appelé par les indi­gènes woll, c'est-à-dire torture.

4. — L'autreespèce de masser qui tient au luxe est appelée mutt marunc, c'est-à-dire,frapper des poignets, des mains. Cette pratique n'existe que dans lesfamilles aisées, quoi qu'elle soit à la portée de tout le monde.

Les vieillards etles daines, en faisant leur méridienne l'après-midi, ou en secouchant la nuit, ont l'habitude de se faire frapper les mol­lets par desenfants de dix à douze ans, ou par leurs domestiques, jusqu'à ceque leurs paupiè­res se ferment à un sommeil doux et calme. Cesagents alternent leurs coups avec lenteur ou célérité, suivant le goût deleurs maîtres, et sont censés s'être acquitté» de leur tâche dèsqu'ils parviennent à provoquer chez eux cet état de repos, qui est tebut des vœux des uns et du travail des autres.

Nous avons dit quece sommeil est, en géné­ral, très léger, à moins que lespersonnes qui font usage de l'action de masser n'y aient d'a­vance lesdispositions requises. La raison en est claire; la liquidité du sang queprovoque cette action artificielle n'étant jamais telle que l'exige laprofondeur du sommeil pour être lucide, elle ne produit que cetteconcentration qui est suffi­sante à un assoupissement ou à unengourdisse­ment, ainsi qu'il convient à la concentration libre.

Aussi l'état desépoptes est inconnu dans les familles et personne dans le monde ne s'occupe dece phénomène singulier. Toutefois les brah­mines le connaissentprofondément et en tirent parti dans leurs pagodes ou temples. Ils ne exposentà la vue du vulgaire que par l'inter­médiaire, ou d'une idole, ou d'unegrande figure à face humaine, afin que le peuple qui y accourt pourconsulter cet oracle sur ses maladies ou sur ses affaires, croit entendre unevoix surnaturelle. D'autres prestiges effrayants et supers­titieux, dont cesprêtres idolâtres l'entourent, empêchent les chrétiens d'yassister, de crainte de passer pour participer à leurs profanes mys­tères.Mais les Portugais, qui, se trouvant en garnison dans ces contrées, se sont peusouciés de la censure de l'opinion publique, ont sou­vent été témoins de tousles accessoires appa­rents de cette pratique.

D'après laconduite mystérieuse que tien­nent ces prêtres, il est difficile de déterminerla manière dont ils provoquent dans leurs épop­tes le sommeil lucide.Mais je suis certain qu'ils n'emploient aucun de ces efforts pénibles dont onfait usage en France et en Prusse. Ma pro­pre expérience m'a assez appris pourpenser qu'ils ne doivent faire que ce qu'il y a à faire ;c'est-à-dire, qu'ils doivent simplement recom­mander à leursépoptes de s'endormir dans les circonstances où ils ont besoin de leurminis­tère, et que ceux-ci, en raison de leur aptitude par lesdispositions requises au sommeil lucide, au gré de leurs désirs, répondentcomplètement aux injonctions de leurs concentrateurs, sans y trouver lemoindre obstacle. Je présume même que ces prêtres connaissent lesecret de perpé­tuer chez leurs époptes l'aptitude à leur con­centrationoccasionnelle.

Mesmer introduisiten France la pratique de son magnétisme il y a à peu prèsquarante ans. On la connut d'abord sous le nom de mesmé­risme, etensuite sous celui de magnétisme ani­mal, par des motifs frivoles quenous avons relevés dans l'Introduction. Mesmer présenta sa méthode sous unappareil extrêmement impo­sant ; de sorte qu'on crut y voir toute autrechose que ce qu'on y voit actuellement, et que ce qu'on devait y voir. Ilprétendit, par ce moyen, non seulement soulager les maux, mais même lesdétruire dans leur racine, lorsque la char­pente humaine n'était pas détraquéeassez pour se trouver dépouillée de toute ressource ; et ses premiers essaislui donnèrent de si heureux suc-ces, qu'il se fit de nombreux partisansdans toutes les classes de citoyens.

Ce genre detraitement n'a rien de commun avec l'action de masser dont nous venonsde parler. Une influence invisible, provenant de l'arrangement de plusieurssubstances de diffé­rentes espèces, semblait maîtriser impercepti­blementle corps des malades, et produire sur eux des crises parfois extrêmementviolentes. Mesmer se trouva même dans la nécessité d'éta­blir une sallepour celle espèce de convulsion­naires, sous le nom de chambre des crisiaques.Ces crises furent peu à peu si fréquentes et si communes qu'ellespassèrent pour être un effet nécessaire de l'indéfinissable magnétisme.Pour les distinguer ensuite (les crises en ce qu'elles expriment, on yadjoignit la douce épithète de salutaire ; parce que, sans savoirpourquoi ni comment, il était décidé que le prétendu magné­tisme nedevait jamais faire de mal aux malades.

L'expérience n'a quetrop prouvé que ces secousses pénibles, foin d'être bienfaisantes,étaient au contraire extrêmement pernicieuses, et même si funestes,qu'il existe encore des per­sonnes qui, pour avoir été y chercher du soula­gementà leurs maux, sont restées jusqu'à ce jour percluses de beaucoupde leurs membres et sont déclarées inguérissables. Ainsi ce ne fut que le motqui y fut adouci : la chose resta invariablement funeste, tant qu'on s'obstinaà recon­naître une vertu salutaire à des substances qui, dans cetusage sont essentiellement malfaisantes.

Voilàtoutefois la source d'où le sommeil lucide tira sa dénomination de crisemagnétique. C'était unir ensemble, par une combinaison disparate, deuxidées qui se repoussent réciproquement et se font une guerre intestine. C'étaitdire qu'une action qui est contraire à la nature par la vio­lence de sesagitations, et qu'un sommeil qui lui lui est conforme par la douceur de soncalme, avaient ensemble une analogie de fraternité pour procurer dubien-être aux malades qui en faisaient l'épreuve. Ce qui est plusétonnant, c'est que malgré l'expérience qui en relève l'inco­hérence,cette dénomination se perpétue encore de nos jours dans la bouche de beaucoupde personnes, lorsqu'elles s'entretiennent de l'état des époptes.

6. — Pour justifierl'expression du mot ma­gnétisme, Mesmer imagina une machine qu'il nommamodestement baquet. Ce baquet, hérissé de baguettes de fer qui secourbaient, et dont les pointes étaient soutenues par l'estomac des malades,contenait de l'eau naturelle, sans aucun mélange de matières. Il étaitnéanmoins surchargé de plusieurs autres substances aussi disparates en naturequ'en vertus. C'était de l'aimant, de l'ambre, de l'or, du cristal et d'autrescorps, dont le choix avait plutôt été suggéré par le caprice que par la raison.La matière électrique qui dominait dans cet amalgame, ou quelqu'autrevertu qui y est inhérente, était précisément ce qui neutralisait la cause dusommeil lucide et du bien-être, et produisait des crispations, desagitations et des crises. L'expérience démontre qu'aucune des substances quigarnissaient le baquet n'avait la moindre analogie avec les effets qu'on prétendaitprovoquer ; presque tou­tes tendaient au contraire à les anéantir, ou dumoins à les dénaturer.

Nous n'osons pasdire que l'électricité seule était la cause de tous les maux qui résultaient dubaquet ; parce que l'or qui est électrique, sympathise avec les uns et nuit auxautres : le cristal, qui est isolant, fait du bien à tous les époptes,ou du moins il ne fait de mal à aucun d'eux : le fer les agite tous engénéral, et le fer n'est pas électrique. Il faut croire que toutes les substancesemployées dans cette machine s'amal­gamaient dans un principe inconnu, maisplus ou moins malfaisant d'après leur nature spéci­fique, comme nous leverrons particulièrement dans la suite.

Ce qu'il y a deremarquable, c'est que le sommeil lucide, si facile à développer dansceux qui en sont susceptibles dans leurs dispo­sitions internes, ne se renditjamais visible aux yeux des spectateurs dans l'usage de ce traite­ment. On nepeut pas penser que dans le nom­bre de malades qui s'y soumettaient en foule,il ne s'y trouvât personne qui y eût de l'aptitude, car les expérienceset les observations démon­trent que le sommeil lucide, qui s'accommode auclimat, aux tempéraments et à la qualité des aliments, est en Francedans le rapport d'un à cinq ou six de la population. Il est donc clairque les procédés de Mesmer étaient plus contraires que conformes audéveloppement de cet état de calme et d'intuition.

Cependant je ne veuxpas avancer que ce phénomène était tout à fait inconnu àce méde­cin. Beaucoup de témoins oculaires assurent qu'ils ont vu des épopteschez lui, et que M. le marquis de Puységur, à qui est attribuée sapremière découverte, n'en est que le propaga­teur. Il est doncprésumable que Mesmer avait une méthode particulière à desépoptes, méthode secrète qu'il avait eu soin de dérober à la con­naissancemême de ses élèves.

7. — La doctrinedont Mesmer accompagna l'explication des effets de cette étrange réunion desubstances si hétérogènes n'est pas moins monstrueuse que son objet.C'est un fluide uni­versel, dirigé par la volonté du magnétiseur, qui semet en relation non seulement avec tout ce qui existe dans l'ordre physique,mais aussi avec ce qui a existé et avec ce qui existera dans un temps àvenir. Il prétend de plus que ce fluide, pour produire son effet, exige que le sujetait une posture déterminée, correspon­dante aux pôles, et que tout mauvaissuccès dans l'entreprise ne dérive que de la négligence àobserver cette condition indispensable. On doit voir par cette additioningénieuse que si quelqu'un ne rapporte pas du baquet les bien­faits qu'il a ledroit d'en recueillir, il ne doit l'attribuer qu'à une cause qui aéchappé à sa vigilance.

La cause d'uneposture déterminée n'est plus, à la vérité, de rigueur chez lesélèves de Mesmer ; mais sa doctrine entière a imprimé sur eux untel sceau de force et de puissance, qu'il les place au-dessus de lasphère humaine, pour disposer à leur gré de toute la libertéinterne de leurs semblables. Je crois, sauf meilleur avis, qu'en renonçant àun moyen qui avait la vertu de parer à toute objection, ces partisans dumagnétisme ont dépouillé leur lumineuse théo­rie de son plus solideappui. A leur place, j'y aurais tenu plus qu'à tout le reste des aphoris­mesde Mesmer, en dépit de toute la force et de toute l'évidence des raisonscontraires.

On se moqua àParis des effets de son fameux baquet, et l'on se tut sur l'absurdité de sa doc­trine.Les commissaires que le Roi nomma pour examiner la nature des laits et pour lesjuger, choisis dans la classe des savants les plus dis­tingués dans lesconnaissances naturelles, ne donnèrent leur attention qu'auxphénomènes, et les rendirent par leurs rapports au moins équi­voques ;pour le reste, ils firent entendre par leur silence que la théorie qui lesexpliquait ne présentait aucun sujet d'observation. Ainsi l'on révoqua en doutece qui était palpable, et ce qui était intrinsèque parut à peuprès indiffé­rent.

Il est constant quel'influence du baquet avait provoqué des effets saillants, tant pernicieux quesalutaires, et même des guérisons merveil­leuses, qui ont été à laconnaissance de tous ceux qui suivaient les expériences de Mesmer ; et ceux quiles suivaient n'étaient rien moins que la presque totalité de la capitale.C'était donc une témérité inconcevable de croire dé­mentir par des mots unpublic aussi nombreux qu'éclairé sur des faits connus et avérés ; mais lalégèreté de la nation lui a en tout temps fait une loi de sacrifier lavérité à la saillie d'un mot piquant. La France ne lui rendra justiceque lorsqu'elle se présentera dans la patrie revêtue d'un costumeétranger.

8. — D'aprèstout ce qui a été enseigné et publié par ce médecin, plus adroit qu'habile, jesuis convaincu qu'il ne se connaissait pas plus à ce qu'il appelait le magnétisme,que celui qui a entendu parler de la manière de guérir les maladespar les songes ou par le sommeil lucide. Il avait sans doute lusuperficiellement ce que les auteurs rapportent par fragments sur la pratiquedes prêtres d'Esculape à Epidaure, et il avait cru débiter auxFrançais, comme une vérité de son invention, ce qui, enveloppé par lui deprincipes aussi capricieux qu'absurdes, n'appartenait qu'au travail et àl'étude des anciens.

N'aurait-il pasdû penser que d'autres après lui devaient aussi approfondir sonsecret, et tôt ou tard y découvrir 1 empreinte de l'auteur qui y avait apposéson sceau? N'aurait-il pas du penser s il avait sondé les forces de son esprit,que la théorie d'un phénomène aussi singulier demandait une étude de laplus profonde pneu­matologie, plutôt qu'un arrangement arbitraire de mots sansconnexion? N'aurait-il pas dû penser, s'il eût été versé dans lessciences phy­siques et métaphysiques, que la matière exis­tante ou unfluide ne peut avoir nulle influence sur le passé, sur l'avenir, sur lesdistances, et qu'une volonté externe no peut agir sur nul objet, et moinsencore sur un objet intelligent, a son insu et malgré lui, sans attenterà sa liberté?

Ce qui me paraitencore plus énigmatique, c'est qu'une grande partie de ses procédés soientencore en usage. On m'annonce que le baquet est rétabli à Paris, sous lenom de réservoir, par une société dite magnétique. Est-il doncreçu qu'en échangeant le nom d'une chose, on change aussi la nature ? Du moinsil est constant que le baquet de Mesmer, avec une grande partie de sesaccessoires pernicieux, a toujours de la vogue en Allemagne, et surtout enPrusse.

Je sens quelorsqu'on s'est donné tant de peine pour résoudre un problème aussidifficile, on doit y renoncer quand on reconnaît l'inuti­lité de ses soins. Maisje ne comprends pas qu'on puisse en revenir à l'absurdité de principesque le temps, l'expérience, l'observation, et surtout la raison ontcomplètement démentis. Est-ce là rechercher la vérité qui échappeà l'étude et à la méditation?

M. le marquis de Puységur,à la vérité, a fait voir le premier le sommeil lucide par l'influence dubaquet; mais on l'a obtenu de même, et avec plus de facilité, par desattouchements, par des gestes et même par des paroles. Pour­quoi doncrenouveler un échafaudage qui, en tout temps, a fait plus de mal que de bienaux malades? S'obstiner à reconnaître dans le baquet une cause qui sedéveloppe sous tout signe sen­sible, cl même naturellement, c'estprétendre la créer, et non la chercher dans le heu qui la recèle.

Tout moyen externequi cadre avec les pré­ventions d'un épopte naturel, suffit pour l'endor­mir etpour le rendre épopte occasionnel. Il n'est donc pas improbable que le baquetde Mesmer ait provoqué quelquefois le sommeil lucide ; mais il est certain quecet adroit spécu­lateur a dérobé la connaissance de ce phénomèneà ses élèves mêmes, et il paraît que l'usage du baquetn'avait été indiqué par lui que pour pro­curer un bien-être aux malades,sans nulle mention de l'existence du sommeil lucide et de l'étal des époptes.

Du moins, M. lemarquis de Puységur, qui était du nombre de ses élèves, n'en connaissaitrien, et il se trouva agréablement surpris, lors­qu'un de ses malades, soumisà l'influence de son baquet à Buzancy, lui déclara spontané­mentqu'il se trouvait dans un profond som­meil. Voilà à quelleoccasion cet ami de l'hu­manité passa pour être le premier qui aitdécouvert le sommeil lucide. Il est présumable que sans lui nous serionspeut-être restés dans 1 ignorance de son existence, malgré tout ce quenous ont transmis les historiens des fonc­tions des époptes dans la célébrationdes mys­tères des anciens, et dans la guérison des malades àépidaure.

Dès cetinstant, M. le marquis de Puységur se livra à l'étude de cet étatextraordinaire, sui­vit les indications des nouveaux époptes qu'il fit, obtintdes guérisons miraculeuses, et publia l'existence du sommeil lucide, sous lenom de somnambulisme. A la suite de cette découverte, le baquet deMesmer, dont il avait fait usage jusqu'alors, perdit la vogue, et fut remplacépar des attouchements, des gestes, de grands et de petits courants, surl'indication de l'un de ses époptes.

Infatigablelorsqu'il sagissait de faire le bien, et de soulager l'humanité souffrante, M.le mar­quis essaya la nouvelle méthode s'en trouva bien, et y ajouta encore denouveaux procédés sur l'indication de nouveaux époptes.

Voilàl'origine du magnétisme par des tubes de fer, d'or, de cristal, par destactiles de toute espèce, à toute distance, et surtout par le secours des végétaux,d'une espèce déterminée d'abord et ensuite généralisée à toutesles plan­tes. Le magnétisme par les arbres prit une grande vogue, parcequ'il semblait offrir une grande facilité à expédier beaucoup de maladesà la fois, et M. de Puységur le mit en pratique avec un grandsuccès dans le traitement de maladies graves et mêmeinguérissables. Il en est résulté ensuite qu'on prétendit magnétiser, sanstrop savoir ce qu'on faisait, l'eau, les ali­ments, les bardes, les bijoux, etl'on obtint réellement des résultats extrêmement satisfai­sants.

M. le marquis dePuységur, très conséquent dans ses actions, vit bien, par toutes lesindica­tions de ses époptes, qu'une vertu précise de faire du bien aux maladeset de produire le sommeil lucide, ne pouvait pas être le par­tage de tantde moyens si différents dans leurs espèces. Il en conclut que lesépoptes, quoique toujours sollicités à donner des consultations dans lesbesoins, n'étaient pas aussi dignes de confiance qu'il les en avait d'abordcrus, et qu'il fallait avoir recours à d'autres sources, pour chercherla cause du bien-être, du som­meil et de ses accessoires, qui sontattribués au mystérieux magnétisme. Il flotta longtemps dans cetterecherche, et après avoir tout à fait rejeté l'influence d'unfluide magnétique qui, dans ses premiers essais lui avait souri, il sedécida définitivement, dit-on, pour l'action d'une volonté externe.

L'homme,naturellement avide de connaître la cause des effets dont il ne peut se rendreun compte satisfaisant, est excusable d'embrasser une erreur, lors surtoutqu'elle s'offre aux yeux entourée del'éclat de la vérité ; et M. le mar­quis de Puységur est de trop bonne foi pourdonner comme principe précis ce qui répugne à sa conscience. Nousapprofondirons en temps et lieu la nature de cette prétendue cause, deve­nuedésormais la seule planche de salut de la théorie de l'indéchiffrable magnétisme,et nous ferons voir qu'elle ne présente qu'un subterfuge ridicule, aussierroné qu'impie.

Si les décisions desépoptes ne méritent point de confiance, ainsi que le prouve l'issue d'unegrande partie de leurs annonces, comment la société dite magnétique peut-elles'en prévaloir pour propager la connaissance de l'état équivo­que des époptes,quoique merveilleux dans beaucoup de rencontres ? Il ne s'agit pas ici de fairedes prosélytes, mais d'instruire ses sem­blables des moyens de se garder deschutes, et de tirer un parti avantageux de l'état des épop­tes. Autrement,c'est répandre une connaissance désastreuse qui renferme plus de ressourcespour faire du mal que du bien : plusieurs mem­bres de la société le savent parleur propre expé­rience, et ne s'en vantent pas.

Toutefois sous leprestige du mot magnétisme. M. le marquis de Puységur a obtenu deseffets si utiles, si nombreux et si étonnants, qu'il a mérité de vivre àjamais dans la mémoire de 1 humanité souffrante. Imperturbable au milieu desplaisanteries les plus amères, patient au milieu de la critique la plusinjuste, prudent au milieu des insultes les plus violentes, il a con­servé leprécieux dépôt de guérir toute espèce de maux au simple son d'un motpour ainsi dire magique.

11. — De l'actiond'une volonté externe, exprimée pour endormir et pour procurer dubien-être aux malades, est résulté le procédé de provoquer lesmêmes effets par la seule pensée, sans être exprimée ni provoquée.On remarqua que des époptes occasionnels s'endormaient dans des appartementsséparés, dès que les concen­trateurs portaient la pensée sur eux pourles mettre dans l'état de sommeil. On essaya le même procédé sur d'autresqui étaient à des dis­tances éloignées, comme dans les provinces et danstes pays étrangers, et Ton obtint quelque­fois les mêmesrésultats.

Il n'en fallut pasdavantage pour regarder comme un principe démontré la puissance de l'actiond'une volonté externe pour endormir. Ce procédé fit du bruit dans son début ;mais il ne fut pas de longue durée, parce que ses effets ne répondirent pastoujours aux prétentions et aux espérances. On se contenta d'en parler, enrapportant avec enthousiasme ce qu'on avait obtenu ; mais on n'osa plus enfaire l'épreuve devant un public pour qui tout devient exgéra­tion, dèsqu'il n'atteint pas par ses sens ce qu'on lui rapporte.

Si l'on eûtréfléchi qu'une vérité, pour être érigée en principe, doit êtreuniverselle, on se serait bien gardé d'attribuer à la pensée desconcentrateurs la cause du sommeil des époptes éloignés. L'expérience prouvaitque cet effet n'était pas commun à tous, et qu'il ne se développait pastoutes les fois qu'on voulait le provoquer sur ceux mêmes qui en avaientfait naître l'idée. Mais on était prévenu en faveur de l'action de la volontéexprimée du concen­trateur ; il était conséquent de croire qu'elle devaitêtre aussi puissante, étant seulement conçue. Il est donc trèsnaturel de présumer que ce sont les préventions qui éloignent l'ob­servateur dedécouvrir la vérité dans ses recher­ches, plutôt que les difficultés quipeuvent la rendre inabordable.

Le sommeil qui naîtde la pensée non exprimée du concentrateur, même à des distanceséloi­gnées, appartient à la complaisance de l'épopte, crue parlui-même nécessaire et forcée, et non à la puissance de l'actionexterne. L'intuition oui parfois se développe dans les époptes, môme dansl'état de sensations, en raison de leurs éminentes dispositions à laconcentration occa­sionnelle, ne leur est jamais connue sans direction commeune faculté qui appartienne à leur influence réfléchie. Voilàpour le moment la raison pour laquelle tous les époptes n'obéis­sent pasà la pensée de leurs concentrateurs, parce que tous n'ayant pas lesmêmes disposi­tions, tous n'ont pas de même cette intuition dansleur étal de sensations pour la connaître ; et pourquoi aussi les mêmesépoptes qui parfois fléchissent à s'endormir sous cette pensée de leursconcentrateurs, n'y fléchissent pas tou­jours, parce que cette intuition n'estchez eux que spontanée à leur volonté. Cette doctrine sera plus clairelorsque nous parlerons de l'in­tuition.

12. — Les procédésque j'emploie en public, pour endormir, sont très simples. C'est unevérité démontrée pour moi, qu'on ne fait point d'époptes de ceux qui ne le sontpas naturelle­ment. On ne cherche donc qu'à développer ceux qui le sontdéjà, toutes les fois qu'ils s'y prêtent de bonne foi. Je m'assured'avance, d'après les signes externes qui seront indiques en temps etlieu, de ceux qui ont des disposi­tions requises à la concentrationoccasionnelle, et en les plaçant commodément sur un siège, je prononceénergiquement le mot dormez, ou je leur montre à quelque distancema main ouverte, en leur recommandant de la regarder fixement, sans endétourner les yeux et sans entraver la liberté de leur clignotement.

Dans le premier cas,je leur dis de fermer les yeux, et je remarque toujours que, lorsque je leurintime l'ordre de dormir, ils éprouvent un frémissement dans tous leurs membreset s'en­dorment. Cette secousse est une preuve certaine non seulement desdispositions requises, mais aussi de leur bonne volonté à s'abandonnerfranchement à la concentration. Cependant je crois qu'il y en a qui,tout en mettant de la can­deur dans leur conduite, ne peuvent pas donner cettemarque de surprise malgré la certitude de l'existence des conditions requises ;parce que des distractions involontaires ou une crainte panique lesempêchent d'être dans la concen­tration qui est propre àleur situation.

Dans le second cas,si je m'aperçois qu'ils ne clignotent pas des yeux, je rapproche graduel­lementma main ouverte, à quelques doigts de distance, et si je vois qu'ils neferment pas naturellement les yeux, je les soumets à une autre épreuveque je développerai tout à l'heure.

Mais avantd'entreprendre de développer les nouveaux époptes, je prends toujours lapré-caution d'endormir dans mes séances des épop­tes déjà habitués ausommeil. Le but de cette mesure ne tend qu'à encourager ceux qui, ayantles dispositions requises, désirent en faire l'épreuve ; parce qu'en voyant lecalme dont les anciens époptes jouissent, ils ne peuvent plus s'inquiéter surle sommeil auquel ils se prépa­rent. Une crainte panique accompagne d'ordi­nairela complexion de ces personnes, et malgré toute leur bonne volonté à seprêter à la con­centration occasionnelle, elles éprouvent desspasmes, des crispations, des convulsions et des suffocations. C'est de cespréventions que pro­viennent ces crises mal à propos appelées salutaires,et non du prétendu magnétisme. Si le concentrateur n'est pas sur sesgardes pour en arrêter le cours à temps, en rappelant aussi­tôt lepatient à l'état naturel, elles laissent quelquefois sur lui destraces pénibles qui de­mandent ensuite des soins particuliers.

13. — Lorsque lesprocédés que je viens d'exposer ne produisent pas les effets attendus, jetouche légèrement les personnes aptes au sommet de la tète, auxdeux coins du front, au nez sur la descente de l'os frontal, au dia­phragme, aucœur, aux deux genoux et aux deux pieds. L'expérience m'a démontré qu'unelégère pression sur les parties où le sang est extraor­dinairementliquide provoque toujours une concentration suffisante à l'abstractiondes sens, quand il n'y a pas opposition de la volonté ou distraction del'entendement, et que quelques-unes des parties mentionnées recèlenttoujours cette condition absolument nécessaire à la con­servation de lavie.

Les endroits précisque les époptes habitués à dormir à l'ordre du concentrateurindiquent facilement, peuvent aussi être connus des personnes qui ne sontqu'aptes à la concentration occasionnelle et qui n'ont jamais dormi aucom­mandement. Pressées successivement dans les parties citées avant que de sesoumettre à l'épreuve, elles ne peuvent se défendre d'éprou­ver unesensation de frémissement, lorsque l'action affecte les lieux quirecèlent du sang fluide. Mais outre que cette connaissance exige dutemps pour être acquise, surtout dans les cercles et dans les assemblées,elle n'assure pas toujours un succès favorable. On ne s'endortoccasionnellement que lorsqu'il y a un parfait accord entre la volontésensitive et la volonté intuitive, comme nous le verrons en parlant du sommeil.

Le diaphragme, etpeut-être le cœur et la glande pinéale, sont les derniers endroitsoù le sang se coagule, lorsque la densité gagne toute la masse pourmettre un terme au cours de l'exis­tence humaine. Toutefois ces parties noblesrecè­lent aussi du sang épais lorsqu'il y en a dans le corps d'autresqui en. recèlent de liquide. Mais d'après ce qui a été dità ce sujet dans l'intro­duction, il n'est pas difficile de sentir que ladensité et la liquidité du sang ont leur intensité et leurs degrés particuliersdans le cours de la vie et dans le terme de l'existence.

Les attouchements,les gestes et les paroles même, ne sont devenus nécessaires pour endor­mirles personnes aptes au sommeil, que parce qu'on pense, en général, que s'il estun magné­tisme qui endort, il doit y avoir aussi une action sensible etapparente. Le sommeil n'est que l'ouvrage de la volonté intuitive, qui est indé­pendantede la volonté sensitive. Celle-ci ne fait que la disposer à agir par laconcentration, et ceux qui ont le sang extrêmement fluide étant plusaptes à se concentrer, s'endorment facile­ment devant le premier signeexterne qui gagne leur confiance. Il est ridicule de penser que des gestes etdes paroles aient la vertu de métamor­phoser un homme en un être qui n'enconserve plus que l'apparence. Des attouchements néan­moins qui comprimentcertaines parties du corps peuvent provoquer cette concentration lorsqu'on s'yprête avec complaisance, comme il arrive en se faisant coiffer ou raser.

14. — Il ne faut pascroire cependant que ceux qui étant aptes au sommeil lucide ont résistéaux procédés indiqués ne dormiront jamais. Ils sont réellement des époptesnaturels, et nouent une conversation suivie, comme les époptes occa­sionnels,si on les interpelle dans leur sommeil naturel de nuit, en employant lesprécautions nécessaires. Ces personnes doivent être soumi­ses aux mômesépreuves plusieurs fois dans la semaine ou tous les jours ; et ce n'est pascertes pour les saturer de l'influence magnétique, comme pourraient lepenser les magnétiseurs ; mais c'est pour les habituer àsurmonter les pré­ventions qui agitent leur sang, et pour les met­tre danscette apathie dont ils jouissent toutes les nuits dans leur sommeil naturel. Onverra, d'après cette conduite, qu'aucun de ceux qui sont aptes àla concentration occasionnelle n'échappera à l'empire du sommeil lucide.

Toutefois, pourabréger cotte route qui sou­vent exige des mois pour être fructueusementparcourue, on abandonne la personne opiniâtre sur un fauteuil jusqu'à cequ'elle s'endorme naturellement, et on la questionne dans son sommeil toutsimplement comme les nouveaux époptes occasionnels, en prenant à sonégard les mômes mesures dont on use à l'égard de ces derniers. On doitavoir ensuite la précaution de graver dans sa mémoire une partie de son entre­tiendurant son sommeil, et on la rappelle aus­sitôt à son état de veille.Cette mesure a pour but de convaincre le nouvel épopte qu'il est sus­ceptiblede dormir au commandement, qu'il a dormi et a parlé, et qu'il n'a rien àcraindre en se livrant désormais au sommeil avec calme et tranquillité.

Nous observons icique cette précaution est à peu près la même àl'égard de tous ceux qui se lèvent, marchent, ou parlent haut la nuit endormant. Cependant il doit arriver souvent qu'ils s'éveillent en sursaut, enentendant des sons auxquels ils ne sont point habitués. S'étant endormis lanuit dans la persuasion qu'ils ne seraient point importunés dans leur sommeil,il est très naturel qu'ils éprouvent une surprise à laquelle ilsne s'attendaient pas. Pour éviter cet inconvénient, il faut leur poser la main,pendant leur sommeil, ou sur le front, ou sur le diaphragme, et l'y tenirpendant deux ou trois minutes; ils répondront avec calme sitôt qu'on leuradressera la parole. Dans cette mesure, les magnétiseurs ne verront queleur sublime magnétisme ; mais elle ne tend qu'à attirer parl'attouchement leur attention deve­nue, dans cette situation,entièrement étrangère à tout ce qui les entoure.

On n'a pas besoin decette précaution à l'égard de ceux qui, après avoir résistéà tous les procédés externes, se ploient par invitation àn'endormir spontanément sur un fauteuil. Ils parlent dans leur sommeil sanssurprise, parce qu'ils s'endorment dans la persuasion de répon­dre auxquestions qui leur seront adressées.

Néanmoins il peut leur arriver, ainsi qu'ilarrive à beaucoup d'époptes endormis la pre­mière foisd'après les règles adoptées, d'être sourds à toutevoix étrangère. Il faut alors employer à leur égard les moyensqu'on emploie à l'égard des autres, et qui seront développés dans lasuite.


1. Anpotius optem utmalacissandos articulo exolets meisporrigam? Ut muliercula ant aliquis ininulicroulatn ex viro versus digitulos meos dncut? »

2. Pcrcurril agilicorpus arto tactatrix manumque doc-lum spargit omnibus membris.

3. Tome I, l’an 1773,aout, page 584.

4. Voyages dans lamer du sud, publiés par W. Hawksworth, tome I.

 

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