La médecine psychologique

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2. - Les traitements des déviations fonctionnelles

Un ensemble de troubles fonctionnels, autrefois considéré comme le plus impor­tant, constitue la maladie de l'hystérie. Ce mot n'est plus guère à la mode aujourd'hui; il a été entraîné par le recul momentané des études sur l'hypnotisme, mais il revien­dra, car il a une belle histoire au point de vue médical et au point de vue psycho­logique et il a l'avantage de ne pas impliquer d'hypothèse aventureuse. Sans doute la conception de l'hystérie présente encore bien des difficultés, niais enfin on est d'accord pour admettre qu'il s'agit d'une certaine catégorie de névropathes et on n'applique pas ce nom indifféremment à toutes les psycho-névroses. Le diagnostic de l'hystérie, sinon sa conception psychologique, est aujourd'hui un objet d'enseignement et la plupart des médecins appliquent ce nom aux mêmes malades.

On admet maintenant ce que j'écrivais en 1892, que la plupart des accidents les plus apparents dépendent « d'idées fixes », c'est-à-dire de croyances erronées mais fixes, développées par un mécanisme psychologique analogue à celui de la sugges­tion. Cette conception implique plusieurs affirmations graves, elle affirme impli­citement que ces malades ne manquent pas de force pour exécuter les actions d'une manière plus correcte, qu'ils ne sont pas profondément épuisés, et qu'il ne s'agit pas d'une grande asthénie psychologique. Elle admet aussi que les tendances psycholo­giques élevées ne sont pas supprimées : ces malades incapables de marcher, de retrouver un souvenir ne présentent pas au même titre que tant d'autres névropathes ces aboulies, ces doutes, ces sentiments d'incomplétude si caractéristiques des dépressions plus accentuées.

Ces deux affirmations ne sont pas tout à fait exactes et il ne faut pas se laisser entraîner, comme on le fait trop souvent, à n'admettre dans l'hystérie que des dévia­tions par suggestion et à oublier qu'il s'agit d'une véritable maladie. Il y a dans l'hystérie de l'asthénie et de l'hypotonie psychologique, mais cette dépression vérita­ble est dissimulée par le phénomène que je décrivais sous le nom de « rétrécissement psychologique » et qui a été depuis présenté de nouveau sous le nom de « refou­lement ». Grâce à la réduction de l'étendue du fonctionnement, qui est une sorte de réaction de défense, l'esprit dont la force et la tension sont diminuées peut faire illusion et dissimuler la dépression véritable. C'est précisément cet abaissement de la tension, cette diminution de la réflexion qui, jointe au rétrécissement, donne à la suggestion son développement et amène les idées fixes.

Si cette conception de la déviation sans asthénie ni hypotonie psychologique est exagérée, elle n'est pas cependant sans importance. Le malade, grâce à ces procédés de défense, souffre peu de sa dépression et se préoccupe davantage des troubles déterminés par telle ou telle idée fixe. On peut, quand on s'occupe d'un hystérique véritable, laisser de côté au moins en partie le traitement de la dépression proprement dite. Il s'agit en général de sujets jeunes dont la maladie ne date que de quelques mois et chez qui elle n'a pas eu le temps de déterminer une dépression profonde et durable, il faut surtout s'occuper de redresser le fonctionnement dévié et c'est dans ce cas que les traitements par la suggestion, par l'hypnotisme et par l'éducation trouvent leurs applications les plus intéressantes.

La suggestion consiste à provoquer artificiellement sous la forme d'une impulsion le fonctionnement d'une tendance que le sujet ne peut obtenir sous la forme d'une volonté personnelle. Pour que notre appel aux activité inférieures soit entendu, il faut que le sujet ait en réserve malgré les paralysies apparentes des tendances bien organi­sées et fortement chargées, il faut qu'il possède un automatisme puissant. Il ne s'agit pas de fortifier l'activité nerveuse et mentale, de lui créer des ressources nouvelles, il s'agit simplement d'utiliser les ressources que le sujet possède déjà. L'individu qui tombe malade peut être comparé à un individu qui n'arrive plus à boucler son budget et qui est acculé à la faillite : il semble être devenu tout à fait incapable de faire les frais d'un certain nombre d'opérations cependant indispensables. Le médecin est appelé pour liquider la situation et réorganiser le budget. Le traitement suggestif ne change pas le train de vie de la maison, il ne fournit pas à l'intendant des ressources nouvelles ; il lui montre simplement qu'il avait sous la main des ressources impor­tantes dont il oubliait de se servir, il les met à la disposition de ce pauvre adminis­trateur qui se croyait ruiné quand il ne l'était pas.

Il est trop évident que c'est là un procédé particulièrement simple pour réorganiser des finances compromises et qu'il n'est malheureusement pas applicables dans tous les cas. Il faut pour pouvoir se conduire ainsi se trouver en présence de ruines plus apparentes que réelles, il faut avoir affaire à des financiers assez naïfs pour crier à la ruine quand il n'y a que du désordre ; il est probable que cela n'arrivera pas souvent. Mais enfin cela arrive quelquefois, puisque l'hystérie existe, Il est bon que le médecin sache à l'occasion jouer ce rôle bienfaisant et facile, c'est là le procédé psychothé­rapique le plus simple. Il faut constater son intérêt, mais il ne faut pas être surpris s'il est trop souvent insuffisant et si l'on est presque toujours obligé de rechercher d'autres méthodes moins simples pour restaurer des fortunes plus sérieusement compromises.

On a beaucoup exagéré les dangers que peuvent présenter ces traitements et je serais disposé à dire que l'hypnotisme et la suggestion sont malheureusement très peu dangereux. Je dis « malheureusement » car un médicament n'est réellement puissant que s'il peut être dangereux et il est bien difficile de concevoir une thérapeutique qui soit à la fois efficace et dans tous les cas inoffensive. Le caractère dangereux d'un poison réclame des études sur les applications et les doses, mais il a été le premier indice de la puissance du médicament. Il n'en est guère ainsi de la suggestion et de l'hypnotisme expérimental qui même mal appliqués ne semblent pas jusqu'à présent pouvoir déterminer souvent de grands troubles. La seule conclusion à tirer maintenant de ces observations c'est que la suggestion ne doit pas être commencée à la légère, qu'elle ne doit pas être supprimée tout d'un coup après la guérison apparente d'un seul accident, qu'il faut avertir le malade et sa famille que sous cet accident il y a un état mental défectueux incapable de se modifier instantanément. Il y a là toute une éduca­tion à faire dans laquelle toutes sortes de procédés thérapeutiques peuvent être nécessaires.

Quoique cela paraisse bizarre et même un peu ridicule, il est utile de dire ici quel­ques mots à propos d'autres reproches qui ont été adressés à la suggestion hypnotique à un point de vue exclusivement moral. Quelques médecins, subitement touchés de la grâce, ont suivi l'exemple donné par M. Dubois (de Berne) et ont déclaré que ce traitement, même s'il était utile, ne devrait pas être employé parce qu'il était humiliant et déshonorant pour le malade et pour le médecin ; il ne me semble pas bien difficile de calmer des scrupules aussi délicats.

Un certain nombre de ces critiques se rattachent aux précédentes et ont rapport aux dangers possibles de la suggestion hypnotique, nous y avons déjà répondu. Déjerine ajoute que la suggestion hypnotique est trop puissante et qu'elle pourrait être employée pour le mal par un médecin indélicat, puisqu'il est possible de faire com­mettre des crimes par suggestion. A supposer que ce soit vrai, quel traitement médical ou chirurgical résisterait à cette critique ? Faut-il renoncer à l'arsenic à cause du crime de Lacenaire ou émousser les bistouris des chirurgiens de peur qu'ils ne s'en servent pour couper la gorge de leurs clients ?

Les autres critiques sont plus directement morales ; elles reposent sur cette idée singulière, c'est qu'il est dégradant d'utiliser des fonctions inférieures de l'esprit qui manquent de dignité. Il est inutile de répondre ici à ces puérilités. Pouvons-nous choisir, pouvons-nous faire appel à la faculté mentale qui nous plaît le plus ? Vous discutez toujours comme si le sujet n'était pas malade et comme s'il pouvait à volonté exercer une fonction quelconque. S'il avait à sa disposition ce raisonnement parfait et cette volonté idéale dont vous parlez, il ne viendrait pas vous consulter. En réalité il s'adresse à vous parce qu'il n'est pas capable de se conduire en homme complet, maître de son moi. « Vous ne pouvez lui faire faire que des pseudo-raisonnements dont vous n'avez pas le droit d'être si fier ». Il est beaucoup plus correct de ne pas chercher à se faire illusion et de s'adresser directement à des fonctions inférieures que le malade possède encore, comme on le fait d'ailleurs dans tous les traitements médi­caux qui sont loin de s'adresser toujours à pure raison. Comme le disait un auteur américain : « Nous ne suspendons pas plus notre jugement en laissant un médecin nous affirmer une idée heureuse qu'en lui permettant de nous introduire une sale capsule dans le corps ».

Dans toutes ces discussions qu'il ne faut pas prolonger, il y a un malentendu : jamais on ne soulève de semblables problèmes à propos des autres maladies et des autres traitements. Quand un homme présente au médecin un chancre syphilitique, celui-ci ne cherche pas si un sermon serait plus noble et plus moral qu'une injection mercurielle. Le praticien ne se voile pas la face quand il introduit un doigt dans l'anus et « il ne se dresse pas sur l'extrémité de ses fesses » quand il met un miroir dans la bouche : le malade est un malade et le devoir le plus noble est de le soigner le mieux possible, voilà tout. Ces scrupules n'apparaissent que dans la psychothérapie, parce que l'on ne peut pas encore s'empêcher de considérer le névropathe et l'aliéné comme des disciples ignorants ou comme des pénitents à qui il faut enseigner la vérité à la mode ou la morale du jour. Quand on se décidera à les considérer comme de vrais malades et quand les psychothérapeutes sauront être de vrais médecins, on ne se souviendra plus de ces problèmes imaginaires.

Dans mon ouvrage sur « les médications psychologiques » j'ai essayé de faire une étude à mon avis beaucoup plus importante sur la valeur même du traitement à un point de vue qui a bien quelque intérêt au moins pour les malades, celui de la guérison. J'ai dépouillé un grand nombre d'observations de névropathes au nombre de 3.500 dont un grand nombre avaient été suivis pendant des années et j'ai cherché à apprécier avec précision et sévérité le rôle que divers traitements psychologiques avaient joué dans l'évolution de la maladie. J'ai cherché en particulier quel était le nombre des cas où la suggestion hypnotique entendue d'une manière très précise avait eu un effet nettement efficace et avait pu déterminer des guérisons nettes prolongées au moins pendant une année. Sans doute ces cas ne sont pas énormément nombreux et je ne mets pas ces statistiques en comparaison avec celles des guérisseurs enthou­siastes de la belle époque de l'hypnotisme ; mais la sévérité qui a été appliquée au choix de ces observations leur donne peut-être quelque valeur à une époque où ces traitements sont contestés et rarement employés.

Dans un premier groupe je placerai des observations curieuses dans lesquelles la guérison se présente rapidement avec une allure analogue à celle des guérisons dites miraculeuses. Dans ces observations il s'agit d'affections sérieuses, bien constatées, ayant eu une durée minima d'un mois, des paralysies diverses, des contractures, des chorées, des mutismes, des troubles de la vue, etc., ayant bien entendu le caractère des affections hystériques que nous venons d'indiquer. Le traitement est pratiqué immédiatement dès la première visite sans analyse psychologique approfondie, sim­plement par la suggestion entendue dans le sens que j'ai défini, tantôt à J'état de veille, tantôt après hypnotisation rapide. La guérison est obtenue immédiatement ou en quelques séances, quatre au plus, et elle est durable, car je ne compte que les cas sans rechute pendant un an. Je ne trouve dans mes notes qu'un petit nombre d'obser­vations qui puissent satisfaire à ces conditions sévères, mais j'en compte cependant 54 qui me paraissent démonstratives. Il me semble que de semblables observations dont on trouverait, je le répète, les analogues dans tous les écrits sur la suggestion hypnotique, justifient les affirmations tant de fois répétées par les hypnotiseurs et montrent qu'il y a là une véritable puissance curative s'exerçant souvent d'une maniè­re tout à fait remarquable.

Je placerai dans un second groupe des observations plus nombreuses dans les­quelles les malades parviennent aussi à une guérison en apparence complète et se maintenant au moins pendant un an, mais dans lesquelles le traitement hypnotique n'a pas eu un résultat immédiat, miraculeux, et a dû être prolongé plus longtemps. Dans la plupart de ces cas il s'agit de malades traités deux ou trois fois par semaine pendant une durée qui a varié de un à trois mois. Je ne range pas dans ce groupe les malades qui ont été traités plus longtemps parce que dans ce cas le traitement me paraît se modifier par l'adjonction d'autres influences. Je n'insiste pas sur la description de ces divers troubles névropathiques analogues d'ailleurs aux précédents. Les accidents dans le traitement desquels la suggestion et l'hypnotisme me semblent avoir eu un rôle important sont surtout les attaques hystériques et particulièrement les attaques délirantes à forme de somnambulisme. Aujourd'hui il semble de mode de mettre en doute l'existence et l'importance de pareils accidents: ils sont cependant assez fré­quents et souvent fort graves : j'en ai observé un fort grand nombre. Au milieu de ces observations je mets à part 64 cas dans lesquels la guérison me semble nettement avoir été obtenue par la suggestion et le sommeil hypnotique. Celui-ci se substitue facilement à l'attaque et il est bien plus qu'elle à la disposition de l'opérateur qui après s'en être servi peut assez facilement le supprimer. Les anciens magnétiseurs avaient déjà remarqué des faits de ce genre : les hypnotiseurs ont fait des remarques analo­gues. « Loin de fabriquer des somnambules par centaines, comme le pensait Calmeil, nous dit Gilles de la Tourette, la magnétisme guérit au contraire ceux qui sont atteints de cette névrose. Chose curieuse le somnambulisme provoqué fait disparaître le som­nambulisme naturel : de sorte que l'on peut être à peu près certain de guérir un somnambule de ses promenades nocturnes en l'hypnotisant [30]. » Cette remarque me paraît l'une de celles qu'il est le plus facile de vérifier : les sujets qui présentent des crises délirantes et des somnambulismes naturels, des fugues suivies d'amnésie sont ceux qu'il est en général le plus facile d'hypnotiser réellement et ceux qui tireront le plus bénéfices de cette intervention.

Enfin dans un troisième groupe je placerai des observations dans lesquelles la suggestion hypnotique n'a eu qu'une action momentanée et n'est jamais parvenue à obtenir une guérison au moins d'une année : des accidents nerveux semblables aux premiers ou analogues réapparaissent toujours après un intervalle plus ou moins long. Ces observations sont très nombreuses au nombre de plusieurs centaines, il est inutile de les compter, puisqu'elles offrent ici beaucoup moins d'intérêt que les précédentes.

Il ne faudrait pas cependant admettre trop vite que dans toutes les observations de ce groupe, les traitements par la suggestion hypnotique ont été sans intérêt pour le malade. Il y a des observations où, sans donner une guérison très prolongée, ces traitements ont cependant rendu des services considérables.

J'ai longuement insisté à ce propos [31] sur une observation remarquable, celle de Nov, une femme que j'avais traitée une première fois quand elle avait 26 ans pour des contractures hystériques des muscles du tronc déterminant cette attitude penchée en avant que l'on a décrite pendant la guerre chez les « plicaturés ». Pendant 20 ans, elle a continué à venir se faire traiter, mais seulement deux ou trois fois par an pour la même contracture qui réapparaissait à propos de fatigues ou d'émotions : chaque fois il suffisait d'un traitement de quelques minutes pour la renvoyer guérie. Il s'agit là d'une maladie hystérique bien curieuse qui pendant vingt ans n'a jamais changé et qui a toujours reproduit la même contracture abdominale du début, c'est un exemple intéressant de l'automatisme psychologique. Mais le traitement mérite également d'attirer l'attention : il s'agit d'un traitement purement moral, je n'emploie que-quel­ques mots et quelques signes et le massage est purement apparent. Ce traitement me semble bien être uniquement suggestif : il s'agit bien d'une série de mouvements et d'actions qui S'exécutent facilement et automatiquement à l'occasion de mes paroles et de mes gestes sans que la malade comprenne comment la guérison s'exécute et sans qu'elle puisse la reproduire volontairement. Ce traitement n'a pas eu d'effet curatif : jamais il n'y a eu une guérison complète pendant un an. On ne peut dire cependant que ce traitement ait été inutile à la malade, ni qu'il ait été difficilement praticable. Pendant vingt ans il a permis à Nov. de vivre chez elle et de travailler très fortement sans conserver jamais son infirmité plus longtemps que quelques jours. Quand on songe aux infirmités permanentes pendant des années et quelquefois pendant toute la vie que peuvent déterminer des contractures hystériques on ne peut nier qu'un traitement semblable ait rendu de réels services.

En résumé cette statistique nous montre 250 cas bien nets où ces applications des traitements par appel à l'automatisme ont eu une valeur incontestable. Bien entendu ces observations n'ont rien d'inattendu, elles ne font que confirmer celles qui ont été publiées par de très nombreux auteurs, mais elles montrent encore une fois la vérité de ces anciennes études. Sans doute il s'agit, comme nous l'avons remarqué au début, de maladies névropathiques très particulières, chez des sujets le plus souvent jeunes et qui ne sont pas encore profondément déprimés. Il en résulte évidemment que ces traitements utiles seulement dans ces cas particuliers ont des indications restreintes. Est-ce là une raison pour les condamner ? Va-t-on s'indigner contre la frotte sulfureu­se parce qu'elle ne guérit que la gale et qu'elle serait désastreuse pour un eczéma? Faut-il tourner en ridicule les injections d'émétine qui guérissent la dysenterie ami­bienne et qui sont inefficaces dans la dysenterie bactérienne. Il est juste de recon­naître l'importance que l'hypnotisme et la suggestion ont eue dans l'histoire de la médecine. Ils seront peut être transformés et oubliés plus tard, mais il n'en restera pas moins qu'ils ont été les premiers traitements psychologiques précis, qu'ils auront préparé la découverte de tous les autres en nous faisant sortir des moralisations indéterminées. C'est là un grand mérite qu'il faut savoir reconnaître et l'effort de tant de chercheurs depuis plus d'un, siècle n'aura pas été inutile pour la science médicale.

Il est intéressant de remarquer que les conditions dans lesquelles on peut appliquer les traitements par éducation sont à peu près les mêmes que les conditions de traitements par suggestion. Ces procédés réussissent bien chez des malades dont les troubles sont localisés à telle ou telle fonction dont le sujet a perdu le gouverne­ment sans qu'il ait une grande dépression générale. Une des preuves de l'efficacité des éducations dans les névroses c'est que nous constatons facilement les effets de mauvaises éducations. Il est fort mauvais sous prétexte d'éviter au malade des peurs on des angoisses, de céder à toutes ses manies et de le laisser faire toutes ses sottises : bien souvent on voit des névroses qui ont été fortement aggravées par des condes­cendances. Les bonnes éducations peuvent avoir une puissance comme les mau­vaises.

Nous avons constaté cette bonne influence dans bien des troubles nerveux : il faut évidemment faire intervenir les éducations dans le traitement des paralysies et des contractures névropathiques. L'effet principal des mobilisations et des massages me semble être une éducation du sujet qui est amené à percevoir avec conscience des modifications des muscles qu'il est trop disposé à oublier. Certains malades doivent apprendre à manger, à boire, à mastiquer, à déglutir, à faire entrer les aliments dans l'estomac, à respirer, à parler, etc. N'ai-je pas eu l'occasion de décrire une malade curieuse qui avait perdu un œil et qui a dû apprendre à se servir de l'autre œil isolé, à pratiquer la vision monoculaire au lieu de rechercher perpétuellement une vision binoculaire devenue impossible [32].

Même dans les cas où d'autres thérapeutiques interviennent au début, l'éducation n'est pas sans utilité : elle intervient plus tardivement à une période déjà avancée de la guérison ; mais elle précise cette guérison. Son rôle essentiel consiste à transformer une action en une tendance automatique, à la fixer en quelque sorte. Il ne suffit pas d'avoir obtenu une fois par un procédé quelconque un mouvement du membre para­lysé et d'abandonner ensuite le malade, car la paralysie ou la contracture serait bien vite aussi complète qu'auparavant. Il faut à ce moment faire répéter le mouvement, le simplifier, obtenir qu'il soit produit avec moins de conscience, moins de surveillance et moins d'efforts : après avoir obtenu l'action isolée, il faut reconstituer la tendance à cette action et l'éducation joue toujours dans cette reconstruction un rôle considé­rable.

En un mot nous retrouvons encore une fois le problème du diagnostic et de l'application précise des médications. Il faudra renoncer à parler d'éducation à tout propos dès qu'il s'agit d'un trouble névropathique, il faudra un jour distinguer avec précision les symptômes et les malades auxquels l'éducation est applicable et la place que cette médication spéciale doit occuper dans le traitement. On verra alors qu'elle ne peut suffire à tout, mais que son rôle reste des plus importants.

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