La médecine psychologique

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1. - L'évolution de la psychothérapie

Pendant longtemps la psychothérapie a été pratiquée d'une façon que l'on peut appeler inconsciente ou du moins irraisonnée. Elle jouait un grand rôle dans les traitements miraculeux dans les influences des religions ou des morales mais les effets que l'on constatait n'étaient pas rattachés à leur véritable cause.

Au siècle dernier la psychothérapie semble avoir pris conscience d'elle-même. La renaissance de l'hypnotisme avait provoqué un grand enthousiasme : « L'esprit n'est pas quantité négligeable, avait dit M. Bernheim, il existe une psycho-biologie, il existe aussi une psychothérapeutique, c'est un grand levier que l'esprit humain et le médecin guérisseur doit utiliser ce levier ». Beaucoup de médecins, comme le Dr A.T. Myers en 1893, ajoutaient: « Nascitur ars nova medendi ; il faut agir, non par l'estomac ou par le sang, mais par la pensée. Il faut pénétrer plus profondément dans le malade en appelant à la rescousse toutes ses forces le plus secrètes ». Sans doute l'hypnotisme et la suggestion après la lutte contre l'école de Charcot, avaient traversé une période de décadence ; mais la thérapeutique morale n'avait pas disparu, elle avait seulement changé un peu son nom, elle s'était présentée sous la forme de traite­ments par le raisonnement et la persuasion. La moralisation médicale de M. Dubois (de Berne), le mouvement Emmanuel et le « new thought movement » en Amérique, les traitements par l'isolement et le repos, les procédés groupés sous le nom de psychoanalyse ne sont que des développements des mêmes croyances sous des noms différents.

Encore au début de ce siècle on avait vu éclore dans tous les pays et dans toutes les langues, surtout dans les pays de langue anglaise une énorme littérature sur ce nouveau moyen de soulager l'humanité souffrante. Pour ne prendre qu'un exemple dans les États-Unis d'Amérique des chaires de psychothérapie avaient été fondées, comme celle de M. Morton Prince à Tuff's collège médical school, à Boston, de nom­breuses conférences étaient faites de tous côtés sur ces sujets, des revues et toutes sortes d'ouvrages étaient consacrés spécialement à ces études. J'ai déjà fait remarquer l'importance d'une littérature à demi-scientifique, à demi-populaire publiée surtout en Amérique ; j'ai signalé les publications de la new thought C°, le grand ouvrage de vulgarisation publié par Parker « Psychotherapy » en trois volumes in-4° qui parut à New-York en 1909 et auxquels collaborèrent un grand nombre de professeurs de neurologie et de psychiatrie, des philosophes et des psychologues aussi bien que les représentants des diverses religions. Il était évident que le mouvement de l'ancien magnétisme animal, de l'hypnotisme et il ne faut pas l'oublier de la « Christian science » de Mrs Eddy avait gagné le grand public. C'est dans ces conditions que mes leçons sur la psychothérapie faites à Boston en 1904 et au Collège de France en 1907 essayaient d'apporter quelque contribution à un ensemble d'études intéressant.

Cependant, si je ne me trompe, ce mouvement se ralentit aujourd'hui et il y a une diminution des études sur la psychothérapie proprement dite, de même qu'en 1895 il y eut une chute de l'enthousiasme provoqué par l'hypnotisme. Ces oscillations de certaines études difficiles et passionnantes sont inévitables et perpétuelles dans tous les domaines de la science : elles sont la conséquence de désillusions après des en­thousiasmes excessifs.

La psychothérapie pas plus que l'hypnotisme n'a donné tout ce qu'on attendait d'elle. Si elle était réellement puissante elle devrait, semble-t-il, nous fournir des médications nombreuses et précises en nous indiquant exactement leurs effets, les modifications bien déterminées moi-ales ou physiques qui suivent leur emploi. C'est ce que font assez bien les formulaires de la thérapeutique physique, quand ils nous parlent de médicaments calmants, soporifiques, purgatifs, altérants, etc. : le médecin peut choisir suivant les cas et les besoins. Il n'existe rien de tel dans la psychothérapie et certains prétendent même que toute classification de ce genre est impossible « parce que les traitements sont personnels et varient simplement avec chaque indivi­du qui les applique ». Cela est fort exagéré, l'originalité de chaque psycho­thérapeute n'est le plus souvent qu'apparente et il ne faut pas croire que son traitement est nouveau, parce qu'il le désigne par un mot nouveau. Mais il est certain que ces traitements étant connus et décrits d'une manière très vague on voit difficilement les relations qu'ils ont les uns avec les autres. Une thérapeutique fondée sur des lois doit surtout nous indiquer les conditions dans lesquelles telle ou telle médication doit être employée, nous montrer en un mot les indications de chaque traitement. Des indica­tions de ce genre existent encore moins dans la psychothérapie. Les dénomina­tions et les diagnostics des troubles psychologiques sont très vagues et tout à fait livrés à l'arbitraire des conventions d'écoles. Quant au diagnostic proprement psychothéra­pique qui serait indispensable, nous avons vu qu'il existait à peine.

Sans doute, comme nous en avons fait la remarque à propos des applications, la psychothérapie semble bien avoir une action efficace d'une manière générale ; mais, dans les applications pratiques à des cas particuliers, elle ne présente pas la certitude ou même la probabilité que l'on obtient dans nombre de thérapeutiques chirurgicale ou médicale. Nous n'avons pas le droit de reprocher aux psycho-thérapeutes les insuf­fisances de leurs méthodes : ils se contentent d'appliquer une science et les insuffi­sances de l'application montrent simplement les insuffisances de la science psycho­logique elle-même.

Le découragement serait encore plus maladroit que l'enthousiasme excessif des premiers temps : à côté des faiblesses il est facile de constater les progrès véritables. La médecine a appliqué au soulagement des misères humaines toutes les découvertes scientifiques même les plus incomplètes et elle a voulu utiliser immédiatement la no­tion d'une loi naturelle, même quand la science commençait à peine à la soupçonner. La psychothérapie a voulu tirer parti de ces innombrables observations des moralistes qui montraient une certaine relation entre des modifications de la santé physique ou morale et l'apparition de certains phénomènes dans l'esprit. Les premiers essais de psychothérapie ont eu un caractère très général et très vague : s'appuyant sur quelques observations en général très peu précises on cherchait à opposer à des troubles physiques ou moraux quelconques, mal déterminés, des phénomènes psychologiques également quelconques et mal précisés. Ce fut le caractère essentiel des premières thérapeutiques religieuses, philosophiques ou morales.

Une connaissance un peu plus précise de quelques faits et de quelques lois psy­chologiques a donné naissance à des essais de psychothérapie un peu plus scien­tifique. Les études sur les tendances, sur les réflexes psychiques, sur les divers automatismes psychologiques ont permis d'utiliser les diverses formes de la suggestion qui cherche à déterminer automatiquement le fonctionnement de telle ou telle tendance. Il en résulte que la suggestion hypnotique n'est plus une thériaque vague que l'on ne peut discuter. C'est un traitement déterminé et en somme d'applica­tion restreinte que l'on peut blâmer ou que l'on peut approuver, que l'on peut conseiller plus ou moins souvent, dont ou petit constater les résultats. Si je ne me trompe, de tels caractères sont extrêmement importants, ils nous font sortir de la période religieuse et morale pour nous faire entrer dans la période proprement scien­tifique de la psychothérapie.

Les notions sur la fatigue, sur l'épuisement, sur la dépression qui suit les dépenses de l'action excessive ont conduit à une thérapeutique par l'économie des forces men­tales, soit que l'on cherchât à supprimer par la désinfection de l'esprit des dépenses en rapport avec certains souvenirs, certaines tendances fâcheuses, soit que l'on cherchât par la suppression des mouvements et des actes, par l'isolement et la restriction de la vie sociale à restreindre les dépenses de la vie. L'examen des transformations que l'éducation permet d'obtenir chez les jeunes enfants a donné naissance à une foule de traitements par la gymnastique ou la rééducation. Enfin les conceptions beaucoup plus hypothétiques qui essayent d'interpréter les changements caractéristiques du réveil, de l'effort, de l'attention, les augmentations merveilleuses des forces que sem­ble déterminer la confiance, la foi, l'enthousiasme ont permis d'entrevoir la puissance des traitements par l'excitation.

Il me paraît bien difficile d'attribuer au pur hasard toutes les améliorations, toutes les guérisons même qui ont été fort bien décrites dans de nombreuses études de la psychothérapie. J'ai insisté moi-même assez longuement sur de nombreuses observa­tions où l'action efficace de tel ou tel procédé de traitement ne pouvait guère être mise en doute. Dès maintenant la psychothérapie entendue dans le sens large, en y compre­nant tous les procédés de traitement déterminés par la connaissance des lois psycho­logiques ou physio-psychologiques a certainement rendu dans un grand nombre de cas des services manifestes.

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